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DEsFIGURES TOXIQUES



Lors de sa résidence aux Laboratoires d'Aubervilliers, Latifa Laâbissi a rassemblé un groupe de recherche, qui avait été initié à Nantes en 2012, réunissant des artistes (Mathieu Kléyébé Abonnenc, Patrick Bernier, Latifa Laâbissi, Olive Martin) ainsi que des théoriciennes et historiennes (Lotte Arndt, Emmanuelle Chérel) issus de différents champs disciplinaires. Ce groupe s'est formé dans l’objectif de réfléchir aux stratégies esthétiques développées dans le champ de l’art (notamment en France) pour notamment transformer les habitus visuels hérités de la colonisation et de ses conséquences. Une première étape de travail à l’École des Beaux-Arts de Nantes en janvier 2013fut consacrée aux notions de stéréotype, contre-stéréotype et anti-stéréotype. La seconde étape de travail a notamment comportée un semaine de rencontres organisée aux Laboratoires d'Aubervilliers, du 9 au 13 décembre 2013.

 

L’expression « figures toxiques » désigne des formes, des images, des corps, des gestes générés par des représentations et des comportements qui produisent dans le champ social et culturel des assignations identitaires, des effets nocifs sur les individus et sur le corps social. Car ils reconduisent des  inégalités, des processus discriminatoires, des différenciations et des réifications identitaires. Elle signifie également un processus de rupture, de transformation, de résistance qui passe par l’utilisation complexe de ces représentations assujettissantes, par leur incarnation, leur déformation, leur torsion, leur défiguration. Ceci afin de retourner ces représentations, de les déconstruire, les désorienter et de désagréger l’enfermement de ces subjectivités étroitement policées. La « figure toxique » est une réaction à la violence éprouvée. Elle habite la crise, elle est omniprésente dans notre société.

DEsFIGURES TOXIQUES s'est attaché à identifier les « figures toxiques » opérantes aujourd’hui dans notre société. Quelles constructions ? Quels effets ? Le corps, comme lieu de symptôme et site de son dépassement, la performance comme espace de transaction de gestes, de circulation, l’institution comme lieu de transmission et d’expériences ont été au cœur de la semaine de rencontres et de programmation, programmée aux Laboratoires d’Aubervilliers en décembre 2013, en guise de seconde étape de travail.

A l'invitation du groupe de recherche, des invités interviendront quotidiennement pour des rencontres, plateformes de discussions et conférences (avec Alice Diop, Marie-Laure Allain, Elena Agudio, Yves Borowice, Maxime Cervulle, Azouz Gharbi, Olivier Marbœuf, Zahia Rahmani, Karima Ramdani, Bonaventure Soh Bejeng Ndikung, Ninette Succab-Glissant, Yolande Zauberman). Par ailleurs des performances de Nadia Beugré, Volmir Cordeiro et Latifa Laâbissi ont ponctuées cette semaine de rencontres.


Les échanges, matériaux et réflexions ont été rendus visibles en s’articulant autour d’un display — agencement malléable d’images et de textes exposés dans les Laboratoires d’Aubervilliers. Ce dispositif s’est enrichi tout au long de la semaine au fur et à mesure des différentes interventions.

Le programme de cette semaine de rencontres est disponible derrière ce lien Ruser l'image.






Ce projet a reçu le soutien du Département de la Seine-Saint-Denis, et a été mené en collaboration avec l’Ecole des Beaux-Arts de Nantes et le Département Danse de l’Université de Paris 8, Saint-Denis.


Mots-clés: 

  • résidence
  • chorégraphie
  • 2013-2014
  • recherche

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Revue N/Z

 






A l'occasion du déploiement du second numéro de la revue N/Z sur l'année 2016/2017, Les Laboratoires d'Aubervilliers sont heureux d'accueillir à nouveau la revue et deux chefs de rubrique pour deux soirées de rencontres publiques.


La revue N/Z s’intéresse à l’écriture, comme pratique de travail, en amont de sa formalisation définitive. Elle observe les processus de création des auteurs et des artistes à travers l’écriture.

Laboratoire de création, elle organise des rencontres publiques sous forme de rubriques une fois par mois, anime un site internet sur la durée de son édition et publie un volume papier à l’issue de l’édition. Chaque édition dure 10 mois. Chaque rubrique est dirigée par un auteur ou un artiste.

Ces chefs de rubrique, qui changent à chaque numéro, invitent à leur tour des intervenants et renouvellent les formes de la rencontre en public. Elle a pour but de toucher un public large, de sensibiliser, de faire découvrir les écritures artistiques contemporaines. Ses activités se déroulent dans divers lieux parisiens et franciliens.

 
Aux Laboratoires d'Aubervilliers en 2016 ce seront

Alban Lefranc pour une première soirée publique
intitulée Etat d'Urgence, Jouissance d'Etat
le vendredi 23 septembre 2016 à 20h

et

Agnès Geoffray pour une seconde soirée
intitulée Suspens & Syncope
le vendredi 27 janvier 2017 à 20h

 


Revue N/Z #2

 

La revue N/Z reçoit le soutien du Goethe Institut


"Du film performatif"

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Du film performatif
Erik Bullot




On assiste actuellement dans le champ du cinéma expérimental et de l’art contemporain à de nombreuses performances qui tentent de remplacer le film par son simple énoncé sous la forme de conférences illustrées ou de lectures. Des fragments d’un film à venir (photographies, documents, fragments de scénario) sont présentés en guise du film lui-même. On ne peut que s’interroger sur ces nouvelles formes. De quoi sont-elles le symptôme ? La conférence illustrée s’inscrit assurément dans le tournant pédagogique de l’art, féru de didactisme et d’utopie éducative, mais traduit aussi, par la projection d’images en mouvement et l’évocation d’un film à venir dont elle n’est que l’esquisse, un déplacement du cinéma vers des formes dissociées de son socle technologique [1]. Le cinéma n’est plus rivé à la séance traditionnelle. Il ne se définit plus par la seule réunion d’un public, d’une salle obscure, d’une durée fixe et d’une projection réglée. Il s’actualise, pour reprendre l’expression de Pavle Levi, « par d’autres moyens » selon des remédiations parfois rétrogrades en empruntant ses modalités à des formes ou des médiums plus anciens [2]. On peut observer à loisir ces effets de migration et de métamorphose. Le cinéma change de corps. Je pense par exemple au projet d’Uriel Orlow, Unmade Film. Face à l’impossibilité éthique de tirer un film de son sujet qui supposerait de mettre en regard le trauma de la Shoah et la destruction d’un village palestinien, l’artiste choisit de déconstruire le paradigme filmique en disséminant son projet artistique dans différentes installations inspirées par la logique du cinéma : les repérages, le storyboard, le script, la partition, la voix off, les répétitions, la mise en scène, la conférence-performance [3]. Le film est désormais à venir, témoignant d’une indétermination essentielle du médium. Le cinéma a-t-il d’ailleurs jamais bénéficié d’une véritable assise ontologique ? Ne s’est-il pas toujours défini par la migration et le déplacement de ses usages ? On assiste aujourd’hui à la reconfiguration de formes oubliées ou latentes de son histoire, notamment par le retour du bonimenteur qui accompagnait de ses commentaires et de ses récits la projection des films avant l’institutionnalisation de la séance autour des années 1915. Cette part longtemps refoulée de l’histoire du médium, désormais activée à nouveaux frais, nous invite à réfléchir sur la nature performative de la séance de cinéma dont le projectionniste fut aussi l’un des agents. Dans le sillage du cinéma élargi (expanded cinema) et de la critique institutionnelle, ces conférences performées ou bonimentées tendent à produire une relation renouvelée avec le public.


DÉFINITION. L’expression film performatif insiste et rencontre un certain succès. Mais comment la définir exactement ? L’adjectif performatif emporte avec lui deux significations : l’une, proprement linguistique, selon les critères proposés par Austin, relative aux verbes performatifs qui réalisent une action par le fait de leur énonciation, selon des conditions sociales déterminées, à l’instar des verbes baptiser ou promettre, la seconde relevant du champ plus général de la performance artistique depuis les années 1960. On assiste chez certains artistes ou cinéastes à une pratique performative du cinéma à la jointure de ces deux significations. Difficile de totalement séparer ces deux définitions : la performance au sens artistique, qui insiste sur la primauté de l’événement et de l’expérience, emporte une dimension performative au sens linguistique. Le performatif ne s’applique plus seulement aux actes de langage mais caractérise aussi nos conduites sociales, politiques, sexuelles [4]. Il s’agit ici de performer le film en son absence. Le choix des qualificatifs adoptés par les artistes pour définir leur performance traduit la relative instabilité du format : conférence, conférence illustrée, conférence performative, projection, conférence-performance, conférence non-académique. Observons dans un premier temps ce que le film performatif n’est pas en le distinguant d’une conférence, d’un film, d’une pièce de théâtre ou d’une performance.


CRITÈRES.

— 1. Le film performatif emprunte souvent la forme de la conférence par la présence d’un orateur ou d’un lecteur face à un auditoire. Notons la présence éventuelle de certains éléments propres à la dramaturgie de la conférence : table, lampe, ordinateur, micro, lutrin, verre d’eau, écran de projection —; position assise ou non du conférencier —; choix ou non d’une amplification de la voix. L’artiste peut choisir d’exhiber les outils techniques de sa conférence (réglages en direct, présence du bureau de l’ordinateur sur l’écran), devenu lui-même une manière de projectionniste, d’appariteur ou de bateleur, à l’instar des séances de Jean-Marc Chapoulie, ou au contraire de présenter une continuité visuelle sans heurt ni rupture, véritable film augmenté de sa seule parole, à l’instar d’Alexis Guillier ou de Rabih Mroué. Sans doute la présence du corps de l’artiste, la place de la parole, l’adresse au public, la possibilité d’un débat à l’issue de la séance accusent-elles la dimension performative de la conférence qui réfléchit ses propres conditions de possibilité en parcourant une archive (Graeme Thomson et Silvia Maglioni), en évoquant un film à venir impossible et virtuel (Uriel Orlow), en confondant fiction et document (Alexis Guillier), en analysant des images trouvées sur YouTube (Rabih Mroué). La forme du métalogue batesonien affleure en filigrane [5]. Peut-on imaginer, comme le suggère Franck Leibovici, la simple conversation comme film performatif ?

— 2. Le film performatif peut partager certains traits propres à la séance cinématographique : la présence d’un public, l’horaire, l’obscurité de la salle, la projection sur un écran. Il recourt très souvent à la projection d’images, fixes ou animées, en présentant les extraits d’un film à venir, les ruines d’un film inachevé ou les fragments d’une archive, mais celle-ci est toujours accompagnée d’une parole ou d’une bande sonore en direct. Film bonimenté, en un sens, qui renoue avec le cinéma des premiers temps. La projection toutefois n’est pas une condition nécessaire. Le film performatif peut aussi emprunter la forme d’une simple lecture (pensons aux lectures de Marcelline Delbecq) ou d’une série d’instructions proposées aux spectateurs, performatif au sens strict en réalisant le film par son seul énoncé, dans le prolongement des travaux de Fluxus ou du lettrisme qui déconstruisent le protocole de la séance de cinéma en invitant le spectateur à produire son film imaginaire singulier [6]. L’artiste peut alors disparaître au profit d’instructions ou de consignes données aux spectateurs qui performent le film selon un protocole plus ou moins respecté.

— 3. Le film performatif participe du théâtre ou du spectacle vivant. Le choix des éléments de décor, les éclairages, le costume de l’artiste, l’activation (éventuelle) d’un script, la part de jeu, mais surtout la communauté formée par l’interaction entre le conférencier et le public rappellent les conditions d’une représentation théâtrale, même si le choix d’une intonation neutre, l’exhibition des paramètres techniques de la séance lui confèrent souvent un certain brechtisme, à la manière dont certaines expériences théâtrales contemporaines explorent les formes didactiques de la leçon, du colloque ou du débat. Sans doute ce retour du théâtre, longtemps refoulé dans l’histoire du cinéma, rappelle-t-il combien ce dernier entretient une relation originelle avec le spectacle forain et l’univers des attractions. Évoquons aussi les lectures de scénario par des acteurs ou, mieux encore, la présence de comédiens actualisant un film sur scène, jouant ou mimant une séquence, rappelant l’exercice de films sans pellicule proposé par Lev Koulechov à ses étudiants de cinéma dans les années 1920, performances théâtrales en regard d’une caméra virtuelle [7]. Il ne s’agit pas toutefois d’opposer la présence du film performatif à la médiation technologique. Le film performatif emporte sa part de technique par le recours aux outils : ordinateur, amplification sonore, projections. Le jeu même du conférencier prend parfois des allures d’automate, comme le suggère l’usage du micro ou du playback. Mais la boucle de rétroaction formée par la présence d’un public reste un élément déterminant du film performatif.

— 4. L’activation du film en direct par l’artiste, la mobilisation de son corps, la nature assez unique de l’événement, même s’il est susceptible de nouvelles présentations ou de reprises, relèvent de la performance [8]. L’artiste convoque un certain nombre d’éléments (extraits de films, images fixes, lectures, enregistrements sonores, musique en direct) qui favorisent la cristallisation d’un film virtuel ou en puissance, aussitôt démembré à la fin de la séance, selon la métaphore du « cinéma explosé » proposée par Graeme Thomson. À l’heure de la dissémination du cinéma dans l’espace public, le film performatif accuse l’instabilité du médium, son atomisation et ses reconfigurations virtuelles, à l’image de notre navigation sur Internet qui renvoie davantage, selon les termes de Lev Manovich, à une promenade dans l’espace qu’à une organisation du temps. Soulignons d’ailleurs combien la plupart de ces films performatifs usent d’images trouvées, samplées et détournées, soumises à de nouveaux agencements et éclairages, selon la tradition du found footage. Au fil de digressions et d’associations d’idées, le film performatif actualise un ensemble éphémère de références érudites et de souvenirs personnels, d’images trouvées et d’archives sonores, qui n’existe que lors de son énonciation publique. Difficile dès lors d’en rendre compte : le filmage de la séance, les photographies de la performance, la publication du texte lu ou improvisé ne sont que des pis-aller qui reconduisent les débats critiques sur l’archive de la performance [9]. Que penser de la photographie d’une silhouette tronquée par le couvercle d’un ordinateur, parcimonieusement éclairée, devant un écran de projection ? Le film performatif peut-il donner lieu à une description comparable aux découpages proposés par une revue comme L’Avant-scène cinéma qui retracerait minutieusement les gestes et les déplacements du conférencier, son discours et ses intonations, les images projetées sur l’écran, les sons diffusés ? L’exercice s’avère rapidement vertigineux. Ne sommes-nous pas en présence, pour reprendre l’hypothèse de Raymond Bellour, d’un « texte introuvable », par l’activation d’une œuvre rétive à la description au moment où le film traditionnel est devenu, lui, grâce à sa reproduction et diffusion numérique, un objet désormais manipulable, lisible, propre à la citation  [10] ? Plus récemment, Bellour reprend son hypothèse en se demandant si l’installation ne renouvelle pas les enjeux théoriques du « texte introuvable » [11]. À cet égard, le film performatif, actualisé au moment de sa présentation publique, pouvant donner lieu à variations et rajouts au gré de ses reprises, participe également du « texte introuvable » filmique.


DU PERFORMATIF. Proposons cette définition du film performatif : un événement, unique ou susceptible de reprises, qui actualise, à travers une série d’énoncés, verbaux, sonores, visuels, corporels, émis par un ou plusieurs participants en présence de spectateurs, un film virtuel, inachevé, à venir ou imaginaire. Situé entre les différents médiums — conférence, film, théâtre, performance —, le film performatif en exacerbe chacune des puissances par une « dénudation du procédé ». Réduit à son simple énoncé, il s’actualise sous les yeux des spectateurs en exposant l’ensemble de la chaîne de fabrication, de la simple intuition à sa cristallisation plastique, renvoyant l’artiste à la fonction de producteur. S’agit-il d’une forme renouvelée d’intermédia selon le terme proposé par Dick Higgins en 1966 ? Higgins analyse de nouvelles pratiques artistiques situées entre les médiums (il situe les performances de John Cage entre musique et philosophie, ou les poèmes-constructions de Filliou entre poésie et sculpture), mais également, prenant acte d’une profonde mutation sociale, entre l’expérience artistique et l’expression de la vie elle-même (life medium), abolissant la frontière entre l’art et la vie. Higgins conclut son manifeste par ces phrases éclairantes : « Le vieil adage n’a jamais été aussi vrai que maintenant, à savoir dire une chose ce n’est pas la faire pour autant. Simplement parler dans nos mouvements ouvriers du Viêt-Nam ou de la crise ne garantit rien contre la stérilité. Nous devons trouver les façons de dire ce qui doit être dit à la lumière de nos nouveaux moyens de communication. Pour cela, nous aurons besoin de nouvelles tribunes, organisations, critères, sources d’information. Il y a beaucoup à faire pour nous, peut-être plus que jamais. Mais c’est maintenant que nous devons gravir les premières marches. [12] » Il est frappant qu’il se réfère au performatif ou plus précisément aux échecs du performatif (« quand dire, ce n’est pas faire »), qui constituent une part importante des réflexions d’Austin, pour évoquer une situation politique concrète. En observant ses propres conditions de possibilité, le film performatif excède le champ autonome de l’art pour envisager son dehors. L’occupation d’un musée, d’un centre d’art, d’une bibliothèque ou d’un appartement privé participe de cet enjeu [13]. Peut-on interpréter certaines situations sociales critiques comme des films performatifs ? Par exemple, l’occupation du parc de Gezi à Istanbul en juin 2013. S’agit-il d’un film performatif avec ses assemblées générales et ses forums, sa dramaturgie proche du théâtre épique brechtien, son art du montage des images et des slogans, son renversement de la relation entre acteur et spectateur ? Sans doute le film performatif a-t-il pour ressort ultime de créer une communauté par l’instauration d’une nouvelle interaction avec le public. Politique du film performatif.


SOUSTRACTION. Ne prend-on pas le risque d’être au diapason de la liturgie néo-libérale, comme le suggère Graeme Thomson dans son entretien, en répondant aux critères d’efficacité et de compétence ? D’une certaine manière, l’artiste promeut son propre travail par sa performance, il en est le bateleur parfois essoufflé. Mais en substituant à la réalisation du film son énonciation, il s’agit d’un « film en moins », favorisant une logique du retrait qui déréalise le film par soustraction. Performer un film au sens strict, dans la logique de l’efficacité et de la compétence, supposerait en effet sa réalisation, aux moyens de budgets dispendieux de préférence, accompagnés d’un battage promotionnel conséquent. L’hypothèse du film performatif propose au contraire la soustraction du film à venir, son suspens, son différé, au sein d’une communauté éphémère. À cet égard, on peut s’interroger sur la pertinence de l’adjectif performatif. Convient-il d’inventer un nouveau terme qui se tiendrait en deçà de la réalisation ? À relire attentivement Austin, on mesure à quel point un performatif peut échouer si ne sont pas réunies certaines conditions : contexte pertinent, personnes appropriées, sens de la sincérité. Austin consacre plusieurs chapitres aux échecs du performatif qui ne répond pas seulement, loin s’en faut, aux seuls critères de l’efficacité et de la compétence. D’où la fragilité du film performatif en quête de ses conditions de possibilité, jamais assurées, toujours incertaines, soumis aux aléas et aux échecs. Sans doute le film performatif ne fait-il qu’actualiser des puissances latentes du cinéma, laissées en jachère, au gré de nouvelles situations historiques. Il serait intéressant à cet égard de rebrousser l’histoire du cinéma élargi, par exemple, ou du paracinéma, pour observer les occurrences passées du film performatif. Les instructions Fluxus ou les séances lettristes, notamment chez un artiste comme Roland Sabatier qui aura exploré de manière systématique la discrétion et la retenue, au diapason d’une sorte de neutralité filmique, participent déjà de cette forme, accusant une indétermination essentielle du médium, échappant à toute affirmation qui le stabilise ou même le réalise, toujours à retrouver ou à réinventer. Le film performatif procède à une remédiation rétrograde au moment où le cinéma se transforme : outre le retour du bonimenteur, apparition sur scène du projectionniste, instabilité du support filmique, situation renouvelée de dialogue avec la communauté des spectateurs, nécessité d’une adresse, production d’une situation. Le cinéma sera performatif, ou ne sera pas.



Erik Bullot aux Laboratoires d'Aubervilliers pour la première séance du cycle Le Film et son double, en avril 2015
_crédit photo : Ouidade Soussi-Chiadmi







1.-  Cf. Thomas Clerc, « Le régime didactique de la performance », artpress 2, n°18, Performances contemporaines 2, 2010, p. 103-112. 

2.-  Lire Pavle Levi, Cinema by Other Means, New York, Oxford University Press, 2012. 

3.-  Lire dans ce même numéro du Journal des Laboratoires le texte d’Uriel Orlow, « Film performance, conférence performance ».

4.-  Cf. notamment Judith Butler, Le Pouvoir des mots. Politique du performatif, trad. Charlotte Nordmann, Paris, Éditions Amsterdam, 2004.

5.-  Rappelons la définition du métalogue : « une conversation sur des matières problématiques qui doit se constituer de sorte que non seulement les acteurs y discutent du problème en question, mais aussi que la structure du dialogue dans son ensemble soit, par elle-même, pertinente au fond. » in Gregory Bateson, « Métalogues », in Vers une écologie de l’esprit 1, trad. F. Drosso, L. Lot et E. Simion, Paris, Seuil, 1995, p. 27-88.

6.-  Cf. Andrew V. Uroskie, Between the Black Box and the White Cube, Chicago, The University of Chicago Press, 2014, p. 51-83.

7.-  Cf. Pavle Levi, « Notes about General Cinefication », in Cinema by Other Means, op. cit., p. 77-104.

8.-  Rappelons combien la séance de cinéma fut longtemps considérée comme une performance à travers le rôle du bonimenteur mais aussi celui du projectionniste qui littéralement performait le film dans sa cabine.

9.-  Nous avons aussi décidé, en accord avec les participants, de ne pas enregistrer les séances du cycle Le Film et son double, qui n’ont donné lieu qu’à quelques photographies. La préparation d’un volume sera l’occasion de réfléchir aux modalités de restitution : entretiens, photographie, commentaires critiques.

10.-  Raymond Bellour, « Le texte introuvable », Ça cinéma 7/8, 1975, repris dans l'Analyse du film, Paris, Calmann-Lévy, 1995, p. 40.

11.-  Raymond Bellour, « Trente-cinq ans après, le “ texte ” à nouveau introuvable ? », in Images contemporaines, Luc Vancheri (dir.), Lyon, Aléas, 2009, p. 17-33

12.-  Dick Higgins, « Statement on Intermedia », publié dans Dé-coll/age, n°6, Wolf Vostell (dir.), Francfort/New York, Typos Verlag/Something Else Press, juillet 1967. Traduction Louis Desrenards.

13.-  Les 1 et 3 mars 2015, l’artiste Pierre Mercier réunissait quelques spectateurs dans son propre appartement, invités à abandonner leur téléphone portable dès l’entrée, pour prendre place dans une pièce plongée dans la pénombre, douée d’une atmosphère propice aux transformations, et assister à la projection de son film Promenade obscure accompagnée d’une bande sonore diffusée en direct.

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Pauline Simon

During her residency at Les Laboratoires d’Aubervillers that began in January 2015, Pauline Simon developed several research themes, a project that in April 2016 culminated in the premiere of Postérieurs (le future n’existe pas mais des futures insistent) at La Ménagérie de Verre in Paris — a choreographic piece in which the Future can be observed from non-anthropocentric perspectives.

 


During her residency at Les Laboratoires d’Aubervillers that began in January 2015, Pauline Simon developed several research themes, a project that in April 2016 culminated in the premiere of Postérieurs (le future n’existe pas mais des futures insistent) at La Ménagérie de Verre in Paris — a choreographic piece in which the Future can be observed from non-anthropocentric perspectives.

Several months later, this new piece that is constantly reworked from the inside will now be showing at Les Laboratoires d’Aubervilliers. Les Laboratoires has also invited the Braquage organisation to reflect with Pauline Simon on a programme of experimental films and auteurs, to put together a set of sources that bring to light, amplify, subvert, shift and reinforce the themes developed in Pauline Simon’s choreographic piece.

Pauline Simon is a choreographer, dancer and amateur musician. She trained in the contemporary section at the Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris. She performs for Joanne Leighton and Mickaël Phelippeau and in her own projects; she has also collaborated with Ambra Senatore on a performance piece, La Vente aux enchères, and acts as outside eye (for Volmir Cordeiro, Ines,…). 

In 2012, with her Exploit project, she was laureate of the Danse élargie competition organised by Boris Charmatz. In 2013, she presented Sérendipité, then Perlaborer with Vincent Dissez, in the ‘Sujets à Vif’ section of the Avignon festival. With the Suprabénigne organisation, Pauline has been developing over the last three years a singular artistic process involving dance, performance and theatre, exploring the notions of language, identity, representation and perception.


The aim of the Braquage / Aménagements expérimentaux organisation is to foster discovery of and engagement with experimental cinema by organising screenings, festivals, discussions (with filmmakers, writers…), lectures and training sessions, as well as practical introductory workshops. Founded in 2000, Braquage is an independent organisation under the French law of 1901, run by filmmakers, teachers, programmers and artists.

Over the last fifteen years or so Braquage has organised around 500 experimental cinema screenings, mixing historical and contemporary films. The programmes are shown both in alternative venues and institutions (FEMIS, Cinémathèque française, Centre Pompidou, Musées des Beaux-Arts, Forum des Images, Nanterre hospital, Musée de la Danse…), and in festivals such as the Bobigny, Saint-Denis, La Rochelle, Belfort, Dreux, Châteuaroux festivals, etc. Braquage has also organised screenings in Lille, Strasbourg, Belfort, Saint-Étienne, Toulouse, La Rochelle, Rennes, Le Havre, Rouen, and abroad (in Europe, the United States, Brazil…).

Presentation of the two days

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LES JOURNÉES DU PATRIMOINE 2016


Les Laboratoires d’Aubervilliers will be opening their doors to the public as part of the Journées du Patrimoine 2016 programme, inviting the public to come and discover the work and the kinds activities that go on in this centre for artistic research and experimentation. Founded in 1994 and housed in a former ball-bearing factory, Les Laboratoires offers artist residencies and many of the unique projects developed at the centre are closely connected to the site itself or its surrounding neighbourhood and its history.

 

Les Laboratoires will be presenting its current and upcoming projects, including “Aubervilliers Got Talent” proposed by Czech visual artist Kateřina Šedá, who is about to begin her residency in September 2016. Her project is an invitation to local residents of Aubervilliers to take part in a special talent contest and the artist will be present both days to discuss her project with visitors.

On Saturday 17 September, Ariane Lablanc, coordinator of the La Semeuse project, a research platform for urban biodiversity, set up at Les Laboratoires in 2011 by artist Marjetica Potrč, will be inviting visitors to learn about the stakes and commitments of this ongoing project via the garden and its various ramifications (the shared gardening spaces, the setting up of a composting system and a henhouse, etc.).

During the two open-days Les Laboratoires will also be housing a small exhibition titled 1001 Plantes, Volume et espace, where visitors will be able to learn about the visual art workshops run throughout the year by Anne Balthhazard, Sylvie Napolitano and Valérie Truong of the Auberfabrik organisation as part of the La Semeuse project.



Saturday 17 and Sunday 18 September 2016
Open to the public from 2 p.m. - 6 p.m.
Hour-long visit/trail
 

Saturday 17 September 2016, 2 p.m. - 5 p.m.
Meet Kateřina Šedá, 2 - 5 p.m.
Learn about La Semeuse, 2 - 5 p.m.

 

Laboratoires d’Aubervilliers
41 rue Lécuyer
93300 Aubervilliers

Information and booking
on (+33) 1 53 56 15 90, or at reservation@leslaboratoires.org




Présentation des deux journées

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LES JOURNÉES DU PATRIMOINE 2016


Dans le cadre des Journées du Patrimoine 2016, Les Laboratoires d’Aubervilliers ouvrent leurs portes afin de faire découvrir ses activités et les pratiques de recherche et d’expérimentations artistiques qui s'y développent. Créés en 1994, installés depuis cette date dans une ancienne usine de roulements à bille, Les Laboratoires d'Aubervilliers accueillent des artistes en résidence qui travaillent à des projets inédits, dont un grand nombre s’articulent en relation étroite avec le territoire d'Aubervilliers et son histoire.

À l'occasion de ces deux journées, Les Laboratoires d'Aubervilliers présentent les projets en cours et à venir, dont notamment celui de Kateřina Šedá, artiste tchèque en résidence à partir de septembre 2016, et dont le projet « Les Talents d'Aubervilliers » s'adresse spécifiquement aux albertivillariens par le biais d'un concours des meilleurs talents de la Ville. L'artiste sera présente pour échanger avec tous à cette occasion.

Par ailleurs, Ariane Leblanc, coordinatrice de La Semeuse, plateforme de recherche pour une biodiversité urbaine, créée aux Laboratoires par l’artiste et architecte Marjetica Potrč en 2011, propose au cours du samedi 17 septembre de faire découvrir les enjeux et engagements de ce projet au long cours, à travers le jardin et ses multiples ramifications (les espaces de jardinage partagé, l'installation d'un compost, la création d'un poulailler, etc.).

Enfin, une restitution des ateliers plastiques menés tout au long de l'année dans le cadre de La Semeuse par Anne Balthazard, Sylvie Napolitano et Valérie Truong de l’association Auberfabrik prend la forme d'une petite exposition intitulée « 1001 Plantes, Volume et espace » qui investit pour deux jours une partie des espaces des Laboratoires d’Aubervilliers.



Samedi 17 et dimanche 18 septembre 2016
ouvert au public de 14h à 18h
Parcours-visite d’une heure
 

Samedi 17 septembre 2016, de 14h à 17h
Rencontre avec Kateřina Šedá
Découverte des enjeux de La Semeuse

 

Laboratoires d’Aubervilliers
41 rue Lécuyer
93300 Aubervilliers

Information et inscription
au 01 53 56 15 90 ou au reservation@leslaboratoires.org




"mais qu’en est-il vraiment… ?" - Entretien avec franck leibovici

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mais qu'en est-il vraiment... ?

Entretien avec franck leibovici
par Érik Bullot



franck leibovici a été invité par Érik Bullot à intervenir lors de la deuxième séance du cycle Le film et son double, le 19 mai 2015 aux Laboratoires d’Aubervilliers. Sa conférence avait pour titre des cartes de conversation (une négociation). Ce présent entretien a été publié dans le Cahier C du Journal des Laboratoires édition 2015/2016.




1. le cycle du film et son double repose sur l’hypothèse du film performatif. faire un film avec des mots. cette hypothèse te semble-t-elle entretenir des liens avec la notion de documents poétiques que tu développes dans ton essai, des documents poétiques (1), qui fabriquent de « nouvelles énonciations » ? saurais-tu les rapprocher et les distinguer ?


le « film performatif » est, selon moi, une piste pour répondre à un problème des réalisateurs de cinéma expérimental (problème qui ne leur est d’ailleurs pas propre, les poètes en font également l’expérience) : devant la réduction des circuits de diffusion, et la disparition des publics de ce cinéma, une sensation d’étouffement peut prendre à la gorge – de moins en moins de possibilités de montrer son travail, ou dans des conditions de monstration tellement dégradées qu’une question comme « à quoi bon ? » peut légitimement surgir. un « film performatif » sous-entend qu’il faut pouvoir travailler dans n’importe quelle condition, avec ce qu’on a sous la main, et non pas en fonction de contraintes économiques ou sociales (attendre le grand soir pour vraiment s’y mettre). si les institutions redirigent leurs budgets vers l’événementiel culturel, aux dépens de productions moins immédiatement visibles, et favorisent des dispositifs comme celui des conférences, parce qu’elles imaginent ces dernières plus légères parce que discursives, alors faisons avec et posons-nous la question de savoir ce que serait faire un film avec des mots pour un tel dispositif. pour inventer cette autre façon de faire un film, il est nécessaire d’envisager le film non comme une liste de propriétés fixées par avance (caméra, acteurs, scénario/projecteur, salle noire, écran, spectateurs silencieux), mais comme un ensemble de pratiques et de médiations, comme une série d’actions et de collectifs. à partir du moment où on désinvisibilise des médiations ou des actions constitutives mais non explicitées de la pratique filmique, ou de sa diffusion, on peut redistribuer différemment les cartes. tu l’as excellemment montré lorsque tu as montré que, historiquement, projeter un film n’était pas l’exécution d’une tâche mécanique (appuyer sur le bouton d’une machine) mais relevait bel et bien d’une pratique, c’est-à-dire d’un répertoire d’actions, de degrés d’habileté d’un projectionniste, de compétences à acquérir, au point que lorsque le système s’est effectivement automatisé, des gens s’exclamaient : « à quoi bon se rendre dans une salle noire si ce n’est plus pour apprécier l’habileté du projectionniste »… ta perspective historique a donc fait surgir des figures et des pratiques qui avaient été invisibilisées, puis effacées de la mémoire collective.

la notion de document poétique est également née d’une situation de blocage. d’une part, des poètes, des artistes, des musiciens, des cinéastes avaient bien à l’esprit qu’un des enjeux majeurs à venir était l’élaboration d’outils pour faire face à une situation où la masse de données et son trop-plein allaient devenir notre lot ordinaire. avec le web, l’unité de référence n’est plus la phrase, ni le texte, c’est la base de données. or, les outils hérités permettaient une saisie efficace et une interprétation des textes, pris un à un (certains outils pouvaient produire un savoir très fin à partir de l’accentuation d’une syllabe dans un vers), mais ces outils devenaient inopérants lorsqu’on avait à faire face non pas à un texte, mais à 900 000 pdf d’un coup – souviens-toi de wikileaks. par ailleurs, la construction documentale de notre réalité était clairement engagée dans une hétérogénéité des régimes sémiotiques : les mots, les images, les sons produisaient ensemble des objets complexes – pas aussi complexes que notre ordinaire quotidien, puisque sauf à être lésé d’un sens, on parle, voit, sent, mâche, pense et respire tout en même temps, mais beaucoup plus complexes que ce que nous offraient là encore les outils d’analyse traditionnels : on traite d’une part les textes, d’autre part, les images, d’autre part encore, les sons. parfois, on s’interroge sur le rapport « texte/image », mais en prenant bien soin de partir de notions suffisamment fixées comme « texte » et « image », de manière à être certain de ne pas aller trop loin… second blocage auquel on faisait face, qui est un peu la traduction politique du blocage disciplinaire évoqué : les praticiens n’ont pas attendu d’autorisation de la part des critiques ou des professeurs pour faire ce qu’ils font, et bon nombre d’entre eux travaillaient depuis longtemps à partir de matériaux préexistants pour rendre compte des transformations en cours de notre monde, en considérant que les matériaux préexistants avaient ceci d’intéressant qu’ils portaient en eux ces transformations, qu’ils en étaient à la fois les acteurs, les vecteurs et les témoins. mais quand ces matériaux étaient, par exemple, politiques, des réflexes pavloviens bondissaient : « mais alors », nous disait-on, « vous êtes pour ou vous êtes contre ? décidez, tranchez ! » l’alternative était soit on fait de l’art pour l’art, compris comme pratique apolitique, taxée de « décorative » (un décor ne pouvant être, dans cette conception, politique), soit on fait de l’art engagé, dans une perspective activiste et militante. hors de cette situation binaire, point de salut. mais certains artistes voulaient simplement forger des outils susceptibles de rendre compte des transformations en cours, non devenir les petits soldats d’une cause, ni de s’enfermer dans une « jalouse pratique ». c’est pour pouvoir se créer un espace de respiration, un espace hors de cette dichotomie, que la notion de « documents poétiques » a été créée. elle permettait de proposer un autre vocabulaire, d’autres catégories de perception et de langage, de manière à ne plus nous obliger à parler dans des termes qui nous enfermaient, mais à l’inverse, à offrir aux gens la possibilité de parler avec d’autres mots, pour dire d’autres réalités.

il arrive que la formulation d’un problème public en vienne à ne plus produire que des impasses. que l’on choisisse l’un ou l’autre terme de l’alternative, ça bloque. un document poétique est un dispositif d’écriture (sans restriction de médium) qui permet de traiter les matériaux produits par ce problème public, en les connectant de manière différente, afin d’en proposer de nouvelles représentations, et donc de reformuler différemment les questions qui le constituent.

document poétique et film performatif ne sont donc pas exactement sur le même plan. leur naissance, ou raison d’être, relève d’une situation de blocage analogue, et tous deux travaillent à redécrire leurs matériaux constitutifs pour produire de nouvelles situations (et améliorer nos compétences respiratoires, d’une certaine façon), mais je ne sais pas – à toi de le dire – si le film performatif vise explicitement, comme c’est le cas pour le document poétique, la production d’une forme de savoir – autre qu’un savoir sur lui-même, sur ce qu’il est ? le document poétique, lui, vise explicitement le « dehors », la situation qui a produit les matériaux qui le constituent. c’est une machine à produire de la redescription, il n’est pas une fin en soi, qualité que l’on a pu attribuer à l’œuvre d’art.
ainsi, un film performatif peut être un document poétique, ou ne pas l’être. et inversement, un document poétique peut emprunter la forme du film performatif, comme il peut emprunter beaucoup d’autres formes. ainsi, la question que je te poserais : une fois dépassée la sidération qu’un film peut être fait, tout ou parties, de mots, le film performatif est-il pour toi un format ou un médium, ou est-ce autre chose ?


2. le document poétique emporte-t-il avec lui une dimension performative ?


tout à fait. et cela, sur plusieurs plans. tout d’abord, mais cela est propre à tout type de document, si on considère qu’un document n’est pas un support matériel où viendrait se déposer de l’information, tel un pollen venant ensemencer une fleur, mais une « technologie intellectuelle » (au sens de jack goody), alors un document est une sorte de feuille de route qui contiendrait des actions gelées à réactiver (un peu comme les « paroles gelées » de rabelais). on pourrait dire qu’un document est un action-freezer, ou n’est rien d’autre que des frozen actions. en cela, par les actions qu’il porte (transporte/comporte/supporte), il est constitué de différentes temporalités. il est à activer comme une partition est à exécuter : le document contient des actions, des acteurs, des institutions, des instructions implicites. « donnez-moi votre siège ! » pour une carte d’invalidité dans le bus, « laissez-moi passer la frontière ! » pour un passeport, etc. ce genre de documents indexicaux ne fonctionnent qu’en situation. hors contexte, ce sont des textes, rien de plus. mais si on y prête suffisamment attention, on peut en voir surgir toute une série d’actions et de pratiques, toute une population qui demeurait invisibilisée tant qu’on intimait au document de répondre à la question de l’auteur, doigt sur la couture.

un document poétique possède les mêmes propriétés, mais relève de surcroît d’une sorte de niveau 2, car il est souvent composé d’un assemblage de plusieurs documents, ou fonctionne comme la redescription d’un document unique, en faisant, par exemple, passer l’arrière-plan de ce dernier au premier plan, ou en en modifiant les focales ou les régimes d’activation. il produit ainsi, ou rend visibles, de nouvelles connexions entre les éléments du document ou dans le parcours d’implémentation du document retraité. il faut donc, là aussi, activer ou faire fonctionner un document poétique selon des règles qui lui sont propres pour qu’il produise ses effets, et mette au jour ses nouveaux chaînages, c’est-à-dire de nouvelles représentations.


3. la conférence peut-elle être assimilée à une carte ? vois-tu des liens entre parler et cartographier ?

tout dépend de ce qu’on entend par « conférence » et « carte ». si on veut dire qu’une carte est réductible à un plan, et qu’un plan n’est finalement qu’un programme, ou une liste d’instructions, alors la mise en équivalence suggérée revient à dire que faire une conférence, c’est finalement oraliser un plan préalablement écrit, en passant d’un format très particulier fait de titres et de sous-titres, d’un système de numérotation (I., 1., a.) à une syntaxe plus ordinaire faite de phrases, avec des idées générales et des exemples d’illustration. la conférence n’est ici que l’exécution d’un chemin de fer. mais les choses ne se passent pas toujours ainsi. il y a des conférenciers qui improvisent, ou qui ne suivent pas leur « plan ». certains en ont fait une pratique élevée au rang d’art. chez david antin, les improvisations sont le strict équivalent des improvisations de jazz (un thème, des variations, des phrasés replacés ou recombinés d’un morceau à l’autre).

de même pour une carte, on peut considérer qu’elle n’est que l’encodage et la mise en visualité d’un territoire déjà constitué, aux formes et aux entités bien arrêtées, bien stabilisées. le cartographe se contenterait alors de calculer des rapports d’analogie (si le lac mesure tant, alors, sur une carte à l’échelle 1/10 000, il mesurera tant). mais lorsqu’on passe des substantifs aux verbes d’action, c’est-à-dire aux pratiques, lorsqu’on ne dit plus « une carte ! », mais que l’on fait une carte, ou que l’on lit une carte, alors toute une série d’actions et d’interactions surgissent, inattendues, dont le déroulé nous est, la plupart du temps, inconnu. les cartes que j’ai présentées durant le cycle que tu as organisé aux laboratoires d’aubervilliers sont des « cartes de conversation ». c’est-à-dire qu’elles cartographient un échange, une interaction. durant la conversation, je note évidemment ce qu’on pourrait appeler les data, le contenu factuel du récit. mais une carte est avant tout une négociation : une fois la conversation terminée, et la mise au propre des data, je montre le diagramme à la ou les personnes pour qu’elles y réagissent : soit des termes qui devraient être côte à côte sont trop éloignés, soit des réalités vraiment distinctes se retrouvent trop proches, etc. ces suggestions de modification ont un effet sur l’ensemble du dessin, et il me faut alors tout redessiner pour tenir certaines règles (par exemple, les liens ne doivent jamais se croiser). après quelques allers-retours, on peut dire que la forme de la carte est le résultat d’une négociation collective (qui peut recommencer lorsque l’éditeur a lui aussi ses contraintes d’impression et de formats). alors, dans ce que tu entends par « film performatif », je serais curieux de savoir si une dimension négociée est incluse dans le format de la conférence (à l’instar de la situation de « faire un film »). pour cela, je crois qu’il faut se départir du régime proprement textuel (la conférence comme l’oralisation d’un texte pré-écrit, fût-il un simple « chemin de fer »), pour accepter un régime plus conversationnel. tant qu’on considère qu’une conférence, c’est du texte, qu’une carte, c’est du document au sens de data fixées sur un support, on demeure dans une réflexion abstraite, hors des situations ordinaires. dès qu’on commence à réfléchir en termes de pratiques, on s’aperçoit que les données se fabriquent « à la main », qu’il y a plusieurs manières de les fabriquer, et qu’on passe notre temps à négocier, quand on parle, quand on cartographie (et donc qu’on ne joue jamais tout seul). il peut exister un script, mais il n’est qu’une ressource parmi d’autres. sinon, il me semble que le terme de film performatif n’apporte pas grand-chose, et que le mot de « théâtre » suffirait (un acteur récitant un texte, avec un peu de multimédia, des projections, des sons, des passages au noir). [je dis cela, et je me dédis immédiatement parce qu’il existe suffisamment de formes expérimentales de théâtre aujourd’hui, qui n’utilisent qu’un script vague et se fondent sur d’autres protocoles de paroles. ce qui veut dire que la forme qu’empruntera le film performatif pourra toujours être rabattue vers des formes déjà existantes dans d’autres disciplines. ce ne sera pas nécessairement du
« jamais vu ». la question sera plutôt de savoir ce que le film performatif peut apporter, non pas au théâtre, mais au cinéma lui-même.]

le modèle conversationnel permet enfin de poser d’autres questions au « film performatif ». dans des récits ordinaires (2), on faisait ressortir des propriétés spécifiques que les œuvres d’art ont en régime conversationnel : durée de vie, augmentation par des œuvres ou par des idées, distribution et circulation de la parole parmi les locuteurs. ces questions ont-elles un sens pour le film performatif ?

4. le geste cartographique peut-il être assimilé à une forme filmique ?

là, c’est toi qui devrais répondre, car c’est toi qui as une pratique filmique conséquente. saurais-tu pointer toutes les situations de négociation incluses dans une forme filmique ? nous dessineras-tu une carte de toutes ces situations ? ce serait une autre image de faire un film. mais regarde-t-on également et écoute-t-on un « film performatif » comme on lit une carte ? pour une carte, plusieurs parcours sont possibles, car là encore, une carte n’est pas un texte linéaire, mais une image, et ses fonctionnements varient selon la situation et l’usage qu’on en a. cette non-linéarité et cette indexicalité à la situation existent-elles dans le « film performatif » ?


 

1/.  franck leibovici, des documents poétiques, limoges, al dante, 2007

2/.  grégory castéra, yaël kreplak, franck leibovici, des récits ordinaires, dijon, les presses du réel, 2014. www.desrecitsordinaires.villa-arson.org

PRINTEMPS DES LABORATOIRES #4 EN LIGNE / ONLINE

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La quatrième édition du Printemps des Laboratoires, organisée les 4 et 5 juin 2016, a rassemblé psychologues, psychanalystes, historiens, chercheurs, artistes, activistes ainsi qu'un large public autour de la thématique Psychotropification de la Société afin d'interroger ensemble le phénomène d'accroissement exponentiel de la médicamentation dans le cadre du traitement des troubles mentaux.

Une grande partie des rencontres de ce week-end riche et dense ont été enregistrées. Les enregistrements sont consultables sur cette page.


The forth edition of the Printemps des Laboratoires, held on the weekend of the 4th and 5th June 2016, brought together psychologists, psychoanalysts, researchers, historians, artists, as well as a wider audience around the theme La Psychotropification of society to question the phenomenon of the exponential rise in the prescription and use of medication in the treatment of mental health disorders.

A large part of talks of this rich and dense weekend were recorded. It is possible to listem them below.




Samedi 4 juin 2016 / Saturday 4th June 2016

Introduction par Dora Garcia (artiste et co-directrice des Laboratoires) et présentation de la problématique de cette quatrième édition / FR

Intervention de Tobie Nathan (professeur émérite de psychologie clinique) : Pour une psychothérapie enfin démocratique... / FR

Table ronde avec Jean-François Chevrier (historien de l'art), Florent Gabarron Garcia (psychanalyste) et Tobie Nathan (professeur de psychologie) : Soigner les institutions : « présences proches », lieux de vie et institutions réinventées  / FR

Auprès du Naufrage, par Silvia Maglioni et Graeme Thomson (artistes) / FR


Performance de Grace Ndiritu : Therapeutic Townhall Meeting: heal the museum / EN




Dimanche 5 juin 2016 / Sunday 5th June 2016

Intervention de Veronica Valentini (critique et curatrice) : The Right to Be Unhappy / FR

Intervention de Magali Molinié (psychologue clinicienne) et Pticarus (explorateur curieux) :  Les morts, ça fait quoi ? / FR

Intervention de Jean-François Chevrier (historien de l'art) : L'hallucination artistique / FR

Intervention de Bárbara Rodríguez Muñoz (critique et cruatrice) : Au-delà du normal et du pathologique, programme de commissariat sur la notion d’effondrement artistique et la médecine / EN

Présentation par Graeme Thomson de l'atelier Idiorhythm (and Blues) par Silvia Maglioni et Graeme Thomson (artistes) proposé en conclusion de cette quatrième édition du Printemps des Laboratoires / FR





MANIFESTO for another perspective on the present

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Manifesto for another perspective on the present
by Ariane Leblanc, coordinator of La Semeuse



Today, the living organism is capital’s new arena of conquest. The stakes are high for every aspect of human life is involved: health, nutrition, education and reproduction.

Capitalism has demonstrated an incredible capacity to anticipate and absorb a multiplicity of notions in order to transform them and divert them from their original purpose, while maintaining the people’s blind faith in the good intentions of market laws.

Today, the property race operates through patents, defining newly acquired rights, and through the lawyers who defend them. But first the living organism had to be made ‘patentable’. Previously, patenting was reserved for new inventions as opposed to discoveries. In the United States, the turn dates back to 1980, when a judgment was passed at the Supreme Court authorising for the very first time the patenting of a living organism, a transgenic bacteria. Europe then followed suit. In July 1998, directive 98/44 of the European Parliament established the legal protection of animals, plants and isolated elements of the human body: “biological material that is isolated from its natural environment or produced by means of a technical process may be the subject of an invention even if it previously occurred in nature”, which is to say, it may be patented.

If the market were to become a very broad organisational matrix of society, we would conclude that everything that governs our environment can be the subject of monetary transaction. Nature, humanity’s shared property, could henceforth be appropriated and privatised.  These individual or collective modes of appropriation have a history, especially in relation to land, raw material and water resources. It developed through the collective appropriations of different spheres in order to give certain multinational companies a better image — like Total for instance, which invests not only in oil and renewable energy but also in culture.

This gives rise to open competition for the control of this property, translating as the mass expropriation of farmers and territories that become the private turf of multinationals. Western laboratories explore plant genetics in developing countries and sell patents at an extremely low price to companies such as Monsanto or Dupont-Pionnner, appropriating in this way plants that have been used for centuries by indigenous populations, thus precluding them from using them.

Based on this analysis, how might we apprehend the contemporary situation? To what extent can we trust what we consume? How can we apprehend our human society if there is no framework of humane values? In the absence of respect for human beings and their environment, we run the risk of reducing everything to the environment’s production value, that of a standardised production and consumption machine constantly calculating how to best optimise its material property.

Diversity is a notion tied to difference and variety. The diversity of living things is considered a key asset for humanity insofar as it has contributed and continues to contribute to our knowledge of the environment we inhabit. Indeed, we glean a better understanding of something by multiplying our perspectives on it.

The standardised, unconscious subjectivity that emerges with capitalist culture has a hegemonic function that produces unilateral exchange systems. Proposed and then imposed, mass culture suffocates the diversity of living things. Monsanto and Sygenta, now merged into a single company, control almost 50% of seeds in the world. The process involves standardising seeds, which are rendered sterile and then sold to farmers, who produce at a loss because every year they are obliged to purchase seeds in order to continue producing. The aim is food dependency, for the companies are perfectly aware that by controlling food production they can effectively control populations.

Put into effect in 1995, the WTO’s Agriculture Agreement aimed to facilitate access to markets, namely by reducing customs duties (by 36% between 1995 and 2000). The agreement had significant repercussions for poorer countries, with an increase in imports to the detriment of local production: according to the FAO, in 2002 Bangladesh had doubled its agricultural imports while Africa also witnessed the massive arrival of imported food products. The opening up of markets was indeed carried out in very uneven conditions: making intensive and specialised farming in the North and certain agro-exporting countries of the South (Brazil, Thailand, Vietnam…) compete with diversified, non-subsidised family farming. The principal victor in this configuration is therefore industrial farming: it is difficult to compete when the productivity gap between African and European farmers ranges from 1 to 500.

Food sovereignty is a concept that Via Campesina, an international network of peasant farmers, presented during the FAO’s World Food Summit in Rome in 1996. It refers to an international right allowing States and State clusters to implement agricultural policies the most suited to their populations and which do not have a negative impact on other populations. In this way, food sovereignty is at odds with the very principles of the WTO. Complimentary to food security, which concerns the quantity of food products available and the population’s access to them, food sovereignty also gives central importance to the social and environmental conditions of production. By valuing the traditional know-how and expertise of peasant farmers, the food sovereignty perspective stresses the fact that food products are not mere consumer goods. It defends local food systems in order to reduce the distance between producer and farmer and give control back to producers.

Let’s defend our local producers!
Take back control over what we eat!
Give back nature’s rights!

Today, the La Semeuse project is working to reassert exchange and swapping systems. The objective is to enable this research platform for urban biodiversity to become a site for information and reflection on contemporary issues relating to genetically modified organisms. The reappropriation of food production involves understanding what multinational companies, with their links to government policies, impose on producers and consequently on consumers. To this end, La Semeuse is working to establish a network of swappers in the Île-de-France (Greater Paris) region in order to foster the exchange of seeds, plants and experiences. The aim is to generate independent local production, among and with participants, but also to involve the broader public in these issues in order to reassert each individual’s capacity to act. We will be programming a series of reflection/discussion sessions and workshops on questions related to seeds, planting and food more generally, which will draw on participants’ know-how, especially those who make up the everyday life of Aubervilliers.


Paris, May 2016

MANIFESTE pour un autre regard sur notre présent

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Manifeste pour un autre regard sur notre présent
par Ariane Leblanc, coordinatrice de La Semeuse



Aujourd'hui, le vivant est la nouvelle conquête du capital. L'enjeu est considérable puisque toutes les dimensions de l'humain sont concernées : santé, nutrition, éducation, reproduction.

Le capitalisme fait preuve d’une incroyable capacité à anticiper et à assimiler toutes formes d’idées afin qu’elles soient transformées ou détournées de leur objectif premier, tout en prenant soin de garder les populations dans une croyance aveugle grâce à la “bienveillance des lois du marché”.

Désormais, la course à la propriété passe par le dépôt de brevets qui définissent les droits nouvellement acquis et par des avocats qui les défendent. Encore a-t-il fallu pour cela que le vivant devienne brevetable. Jadis, seules les inventions pouvaient l'être, et non pas les découvertes. Aux États-Unis, le tournant date de l'année 1980 avec un arrêt de la Cour suprême qui a, pour la première fois, autorisé le dépôt d'un brevet sur un être vivant, en l'occurrence une bactérie transgénique. L'Europe a suivi. En juillet 1998, la directive européenne 98/44 sur les biotechnologies a rendu légale la brevetabilité des animaux, des végétaux et des éléments isolés du corps humain, comme les gènes, « toute matière biologique même préexistante à l'état naturel du moment qu'elle soit isolée de son environnement naturel ou produite à l'aide d'un procédé technique » peut être brevetable.

À supposer que le marché devienne une matrice d’organisation très étendue de la société, on déduirait que tout ce qui régirait notre environnement pourrait être considéré comme pouvant faire l’objet d’une transaction monétaire. Le bien commun de l’humanité qu’est la nature pourrait désormais être approprié à des fins de privatisation. Ces modes individuels ou collectifs d’appropriation ont une histoire, en particulier en lien avec les terres, les ressources en matières premières et en eau. Cela s’est développé avec les appropriations collectives des domaines afin d’en tirer un meilleur profil pour des certaines multinationales, comme Total par exemple qui investit dans le pétrole, les énergies renouvelables mais aussi dans la culture.

Il s'ensuit un déchaînement des luttes concurrentielles pour le contrôle de cette propriété, dont l'enjeu est l'expropriation du plus grand nombre de paysans et la constitution de chasses gardées des territoires par les multinationales. Les laboratoires occidentaux prospectent sur la génétique de la flore des pays en voie de développement et vendent à un coût dérisoire des brevets aux entreprises comme Monsanto ou encore Dupont-Pionner s’appropriant ainsi des plantes utilisées par les peuples indigènes depuis des siècles, les privant alors de la possibilité de les exploiter.

Fort de cette analyse, comment peut-on juger la situation contemporaine ?  Quelle confiance pouvons nous avoir en ce que nous consommons ? Comment peut-on penser notre société humaine sans valeurs humaines pour l’encadrer ? Faute de s’étendre sur le respect de la personne et de son environnement nous risquons de tout ramener à sa valeur productive, à celle d’un automate producteur et consommateur normalisé calculant en permanence l’optimisation de son bien matériel.

La diversité est une notion qui se réfère à la différence, à la variété. L’existence de la diversité du vivant est considérée comme un actif important pour l’humanité dans la mesure où cela a contribué et contribue à la connaissance que nous avons aujourd’hui de l’environnement dans lequel nous vivons. En effet la compréhension d’un objet de réflexion peut s’enrichir par la diversité des points de vue et l’ouverture du regard que nous portons sur lui.

La subjectivité inconsciente normalisée initiée par la culture capitaliste possède une fonction hégémonique qui produit des systèmes d’échanges unilatéraux. Proposée puis imposée, la culture de masse étouffe les dissemblances du vivant. Monsanto et Sygenta qui aujourd’hui forment la même entreprise contrôlent près de 50% des semences mondiales. Cela passe par une uniformisation des graines rendues stériles et vendues aux agriculteurs qui produisent à perte car ils sont obligés de racheter de quoi produire chaque année. L’objectif est la dépendance alimentaire car, il l’ont bien compris, le contrôle de la  production de la nourriture permet le contrôle des populations.

Entré en vigueur en 1995, l’accord sur l’agriculture de l’OMC vise à faciliter l’accès aux marchés, notamment par l’abaissement des droits de douane (de 36 % entre 1995 et 2000). Il a de fortes répercussions pour les pays pauvres, avec une hausse des importations au détriment de la production locale : selon la FAO, dès 2002 le Bangladesh avait doublé ses importations agricoles quand l’Afrique voyait sur ses étals l’arrivée massive de produits alimentaires de base importés. L’ouverture des marchés a en effet été réalisée dans des conditions très inégales : elle met en concurrence une agriculture intensive et spécialisée du Nord et de certains pays agro-exportateurs du Sud (Brésil, Thaïlande, Vietnam…) avec une agriculture familiale diversifiée et non aidée. C’est donc surtout l’agriculture industrielle qui sort gagnante : difficile d’en être concurrent quand les écarts de productivité entre agriculteurs africains et européens sont de 1 à 500.

La souveraineté alimentaire est un concept présenté par Via Campesina, réseau mondial d’organisations paysannes, lors du Sommet de l’alimentation de la FAO, qui s'est tenu à Rome en 1996. Il s’agit d’un droit international laissant la possibilité aux États ou aux groupes d’États de mettre en place des politiques agricoles les mieux adaptées à leurs populations sans impact négatif sur les populations d’autres pays. La souveraineté alimentaire s’oppose ainsi aux principes de l’OMC. Complémentaire de la sécurité alimentaire qui concerne la quantité d’aliments disponibles et l’accès des populations à ceux-ci, la souveraineté alimentaire accorde de surcroit une réelle importance aux conditions sociales et environnementales de production. Elle insiste sur le fait que les aliments ne sont pas que de simples biens de consommation car elle valorise les savoir faire traditionnels des paysans. Elle défend les systèmes alimentaires locaux afin de minimiser la distance entre producteur et agriculteur et de rendre la gouvernance au producteur.

Défendons nos producteurs locaux!
Reprenons le pouvoir sur ce que nous mangeons!
Rendons ses droits à la nature! 

Aujourd’hui, La Semeuse travaille à revaloriser le geste du troc. L’intention est de permettre à cette plateforme de recherche pour une biodiversité urbaine de devenir un lieu d’information et de réflexion sur les problématiques contemporaines des organismes génétiquement modifiés. La réappropriation de la production alimentaire passe par l’information de ce que les multinationales, liées aux politiques gouvernementales, imposent aux producteurs et par voies de conséquences aux consommateurs. Pour cela La Semeuse œuvre à mettre en place un réseau de troqueurs en île-de-France afin de favoriser l’échange des graines, des plantes, d’expériences. Ceci afin de générer entre et avec les participants du troc une indépendance de productions locales, mais aussi d’ouvrir à un public plus large ces questions afin de réaffirmer le pouvoir d’agir de tous. Des temps de réflexions et d’ateliers seront mis en place sur ces questions de la graine, de la plantation mais aussi de la nourriture, en s’appuyant sur les savoir-faire de chacun et en particulier des acteurs du quotidien d’Aubervilliers.


Paris, mai 2016

Postérieurs (le futur n'existe pas mais des futurs insistent)

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15. Septembre 2016 - 19:30» 22:00
Thursday 15th Septembre 2016, 7:30 pm

 

Postérieurs (le futur n'existe pas mais des futurs insistent)
followed by a carte blanche invitation to Sébastien Ronceray.


Postérieurs is a timeless epic saga. Four dancers sing for the return, dance for respite, and read the future in the belly of a sea monster. In the belly, they saw a solar eclipse and the Earth’s apocalypse. As in primitive rituals, the poet (who can also be the dancer, the singer, the magician) masters a set of techniques and languages that could potentially solve the seemingly contradictory propositions.


Choreography and direction:

Pauline Simon in collaboration with the performers
Performers: Paula Pi, Céline Cartillier, Aude Lachaise and Pauline Simon
With the participation of: Erwan HaKyoon Larcher
Collaboration, support: Pauline Brun
Writing: Céline Cartillier, Pauline Simon and Aude Lachaise
Sound, stage and video management: Eric Yvelin
Light: Florian Leduc
Invaluable presences or exchanges:
Duncan Evennou, Julien Lacroix, Antoine Cegarra, Elise Simonet, Léa Lansade, Joffrey Becker
Costumes: Maman ( aka Marie-Thérèse Simon.) et quelques achats sur internet
Acknowledgements: Benoit Verjat, Eric Minh Cuong Castaing ainsi que ceux qui se reconnaîtront car les gestes pour ce projet furent nombreux

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This project was sponsored by DRAC Île de France, la Ménagerie de Verre, Les Laboratoires d’Aubervilliers, Montevideo centre de créations contemporaines, Marseille, as part of a sponsorship scheme from the PACA region - APOCS scheme, the spedidam, the CCN in Nantes, the Théâtre de Lorient, and has also enjoyed studio time ant the CND, CDC Atelier de Paris. The project was also awarded the Beaumarchais/SACD writing and residency support fund.



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Carte blanche to Sébastien Ronceray / Braquage


Taking as its point of departure an Apocalypse that emerges beyond our everyday perceptions, in the space of those banished from the City, this experimental film programme explores forms of trauma that question the very existence of ontologically human, but also figurative, narrative and perceptual references points. How is matter attacked, i.e., the matter of thought, and even that of creative tools ? What, in the human body or the body of materials might be saved, reanimated? This can lead to a sense of being born again, beyond our recovery of the world and its images.


Banlieue du vide by Thomas Köner (2003)     
Allemangne/Mini DV/n&b/12'

There is still enough Time by Mathieu Bouvier and Céline Cartillier (2016)
France/Digital/colour/30’

Our Voices are Mute by SJ. Ramir (2008)                      
New Zeland/Mini DV/colour/5’

Stadt in Flammen by Schmelzdahin (1984)                  
Austria/16mm/colour/5

Principle 8 by Botborg (2005)                                   
Collectif International/Mini DV/colour/4'

The Last Shot by Cécile Fontaine (1999)                        
France/16mm/colour/7'

Cannot Exist by Stan Brakhage (1994)                       
EU/16mm/colour/silent/3’

Le bourreau turc by Georges Méliès (1903)                     
France/16mm/n&b/silent/3'


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Free admission on booking
at reservation@leslaboratoires.org or by
phone 01 53 56 15 90

The evening will begin at 7:30 pm and bar will be open from 7 pm


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Standard

Offres d’emploi

Contact & Accès

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Les Laboratoires d'Aubervilliers

41 rue Lécuyer
93300 Aubervilliers
France

Tél.: +33 1 53 56 15 90
Fax: +33 1 53 56 15 99
E-mail: info@leslaboratoires.org

Les Laboratoires d'Aubervilliers sont ouverts
du lundi au vendredi, de 10h à 18h,
hors ouvertures publiques.

Plan d’accès aux Laboratoires d’Aubervilliers

Nous sommes à 500 mètres de Paris - Porte de la Villette!
Métro: Ligne 7 Aubervilliers-Pantin Quatre-Chemins (sortie Avenue de la République, côté des numéros impairs)

Bus: 170, 150, 152, 249

Vélib: stations 35003, 33005 (plan)

Équipe

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Conseil d’administration
Xavier Le Roy (président) 
Corinne Diserens
Jennifer Lacey
Mathilde Monnier
Jean-Luc Moulène
Jean-Pierre Rehm
Bertrand Salanon

Direction collégiale
Alexandra Baudelot
Dora García
Mathilde Villeneuve

Équipe permanente
Florine Ceglia (administration)
Julia Gomila (assistante de Kateřina Šedá)
Pauline Hurel (accueil, relations avec les publics, documentation)
Marie-Laure Lapeyrère (communication et relations presse)
Ariane Leblanc (coordination La Semeuse)
Sorana Munteanu
(attachée à l'administration)
Zoé Philibert (attachée à la communication)
Eric Rouquette (comptabilité)
Amaury Seval (régie générale)
Pierre Simon (coordination des projets et éditions)

Et aussi
Kate Davis (traduction du site)
collectif g-u-i (graphisme, webdesign)
Philaug (maintenance informatique)

Team

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Board
Xavier Le Roy (President)
Bertrand Salanon
Corinne Diserens
Jennifer Lacey
Mathilde Monnier
Jean-Luc Moulène
Jean-Pierre Rehm

Codirection
Alexandra Baudelot
Dora García
Mathilde Villeneuve

Staff
Florine Ceglia (administration)
Julia Gomila (assistant to Kateřina Šedá)
Pauline Hurel (public relations)
Marie-Laure Lapeyrère (communication and press relations)
Ariane Leblanc (La Semeuse coordination)
Sorana Munteanu
(administration assistant)
Zoé Philibert (communication asssitant)
Eric Rouquette (accountant)
Amaury Seval (technique)
Pierre Simon (projects coordination)

 



And
Kate Davis (website translation)
collectif g-u-i (graphism, webdesign)
Philaug (information systems)



Presentation

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common infra/ctions

 

« I shall speak that sleepwalker’s language that would not be a language if I were awake ». Clarice Lispector




Following on from their multi-faceted work around Félix Guattari’s unrealised sci-fi film Un amour d’UIQ (Univers Infra-quark), Silvia Maglioni and Graeme Thomson’s project for their residence, common infra/ctions, proposes to go beyond the coordinates of the film towards a broader investigation into the notion of the infra and its potentialities. 

common infra/ctions combines the idea of infraction in the sense of breaking established rules and codes, with that of infra action as a form of intervention taking place at once beneath and beyond the realm of action, on the margins of perceptibility and at the threshold of the common, a space that brings into play constellations of whatever singularities and improprieties.

The double sense of infra/ction will inform and affect Silvia Maglioni and Graeme Thomson’s interventions and productions both at the level of the artistic protocols used and the processes triggered through such modified or invented procedures, in a movement of contraction and expansion that will traverse interconnected areas of enquiry including language (and its unlearning), micropolitical weather-fronts, idiorhythmic assemblages, dark matter cinema and infraferences.


blog common infra/ctions:
http://cargocollective.com/common-infractions

Silvia Maglioni et Graeme Thomson have opened a research blog that they will be updating regularly during their residency at Les Laboratoires d'Aubervilliers. Discover some of the images, sounds texts and videos that traverse their journey into the realm of the infra.

Infra-events

UIQ (the unmaking-of)
light enough to see by

The first event of common infra/ctions took the form of a collective listening of visions of an invisible film: UIQ (the Unmaking-of). This electroacoustic soundwork by Graeme Thomson and Silvia Maglioni has been activated at Les Laboratoires d'Aubervilliers the time of an evening, Friday 22 January 2015.

Dark Matter Cinema - Nocturnal Committee #1

For the second event of common infra/ctions, Silvia Maglioni et Graeme Thomson invit public to join the Nocturnal Committee at Les Laboratoires d’Aubervilliers for an evening of hypnagogic projections and liminal visions. This was programmed Tuesday 16th February 2016.

Through the Letterbox

In conclusion of the reading workshop of Le Printemps des Laboratoires #4, Silvia Maglioni and Graeme Thomson have proposed an immersion in the course of Gilles Deleuze at Vincennes (1975-1976), through the screening of a new edit of Through the Letterbox, taking up a series of motifs around the theme of Psychotropification. This was programmed Thursday 7th April 2016.


One Disappear

As part of the 4th edition of Le Printemps des Laboratoires, Silvia Maglioni and Graeme Thomson have presented the screening of Disappear One, their film, at the movie theater Le Studio in Aubervilliers. This was programmed Thursday 2nd June 2016.


Dark Matter Cinema - t (OUT)e la nuit - Nocturnal Committee #2

For the second gathering of the Nocturnal Committee, summoning the tutelary spirits of Jacques Rivette and Chantal Akerman, Silvia Maglioni & Graeme Thomson invite you to join them in an all-night-long experiment in collective hypnagogic vision. This was programmed Friday 8th July 2016.

 


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Map, courtesy Silvia Maglioni et Graeme Thomson

 

Mots-clés: 

  • residency 2015/2016
  • cinéma
  • Langage
  • micropolitiques

Présentation

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common infra/ctions

 

 

« Je parlerai dans cette langue de somnambules qui, si j'étais éveillée, ne serait pas même un langage ». Clarice Lispector




À la suite de leur projet multiforme UIQ film QUI manque (2010-2015) autour du film non-réalisé de science-fiction de Félix Guattari, Silvia Maglioni et Graeme Thomson proposent d’étendre l’Univers Infra-quark aux Laboratoires d’Aubervilliers pour explorer en profondeur la dimension infra et ses potentialités.

common infra/ctions combine l’idée d’infraction, dans le sens de la rupture de règles et de codes établis, avec celle d’action infra comme forme d’intervention qui se déroule en deçà et au-delà du domaine de l’action, sur les marges de la perceptibilité et au seuil d’un espace qui pourra amener à la fabrication de pratiques et d'usages communs.

À la fois recherche de formes expérimentales et forme expérimentale de recherche, leur résidence conjuguera des micro-installations dans le temps et dans l’espace des Laboratoires d’Aubervilliers avec une série d’ateliers et d’évènements publics. Un mouvement de contraction et d’expansion traversera les territoires interconnectés du projet, notamment la matière noire du cinéma, le désapprentissage de la langue, le langage des oiseaux, les fronts micropolitiques, les assemblages idiorhythmiques, les infra-férences, la fabrique du commun.



blog common infra/ctions :
http://cargocollective.com/common-infractions

Silvia Maglioni et Graeme Thomson ont ouvert un blog de recherche qu'ils mettent à jour régulièrement lors de leur résidence aux Laboratoires d'Aubervilliers. Vous pouvez y découvrir quelques images, sons, textes et vidéos qui traversent leur voyage dans l'infra.

 

 

Infra-événements


UIQ (the unmaking-of)
light enough to see by

Le premier évènement de common infra/actions a pris la forme d'une écoute collective des visions d'un film invisible : UIQ (the unmaking-of). Cette pièce électroacoustique de Silvia Maglioni et Graeme Thomson a été activée aux Laboratoires d'Aubervilliers le temps d'une soirée, le vendredi 22 janvier 2016.

 

Dark Matter Cinema - Comité Nocturne #1

Pour le second évènement de common infra/ctions, Silvia Maglioni et Graeme Thomson ont invité le public à rejoindre un Comité Nocturne aux Laboratoires d’Aubervilliers pour une soirée de projections hypnagogiques et de visions liminales, le mardi 16 février 2016.

 

Through the Letterbox

En conclusion des ateliers de lecture du Printemps des Laboratoires #4, Silvia Maglioni et Graeme Thomson ont proposé une immersion dans le cours de Gilles Deleuze à Vincennes (1975-1976), avec la projection d'un nouveau montage de Through the Letterbox, spécialement  réalisé à partir de certains motifs liés au thème de la Psychotropification, le jeudi 7 avril 2016.

 

Disappear One

Dans le cadre de la 4e édition du Printemps des Laboratoires, Silvia Maglioni et Graeme Thomson ont présenté la projetion de leur film Disappear One au cinéma d'art et d'essai Le Studio à Aubervilliers, le jeudi 2 juin 2016.

 

Dark Matter Cinema - t(OUT)e une nuit - Comité Nocturne #2

Pour le deuxième rendez-vous du Comité Nocturne, Silvia Maglioni et Graeme Thomson ont convoqué les esprits tutélaires de Jacques Rivette et Chantal Akerman et convié le public à faire l’expérience d’une nuit hypnagogique nourrie de visions collectives. Ce rendez-vous a eu lieu dans la nuit du vendredi 8 juillet 2016.






 




 

Mots-clés: 

  • résidence 2015/2016
  • cinéma
  • Langage
  • micropolitiques

Carte, courtesy Silvia Maglioni et Graeme Thomson

Présentation

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Pauline Simon



Dans le cadre de sa présence aux Laboratoires depuis janvier 2015, Pauline Simon a développé plusieurs axes de recherches qui ont abouti en avril 2016 à la création de Postérieurs (le futur n'existe pas mais des futurs insistent)à la Ménagerie de Verre à Paris : une pièce chorégraphique où le Futur pourrait être observé depuis des points de vue non-anthropocentrés.

Plusieurs mois après sa création, Les Laboratoires d'Aubervilliers accueillent cette nouvelle pièce constamment travaillée de l’intérieur. Ils invitent également l’association Braquage à dialoguer avec Pauline Simon pour concevoir une programmation de films expérimentaux et d’auteurs comme autant de sources qui viennent mettre en lumière, amplifier, détourner, décaler et renforcer les axes développés dans ce travail chorégraphique.

Pauline Simon, chorégraphe, danseuse, performeuse et musicienne amateur, se forme au Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris, dans le cursus contemporain.Elle est interprète pour Joanne Leighton, Mickaël Phelippeau, ou dans ses propres projets, elle collabore également avec Ambra Senatore autour d'une performance, La Vente aux enchères, ou en qualité de regard extérieur (Volmir Cordeiro, Ines, ...). 

Lauréate en 2012 pour son projet Exploit du Concours Danse élargie, initié par Boris Charmatz. En 2013, elle crée Sérendipité, puis Perlaborer avec la complicité de Vincent Dissez à Avignon pour les sujets à vif. Avec l'association Suprabénigne, Pauline développe depuis trois ans ans une démarche artistique propre où cohabitent danse, performance, théâtre autour des notions de langage, identité, représentation et perception.


L’association Braquage/Aménagements expérimentaux a pour but de favoriser la connaissance, l’étude et la découverte du cinéma expérimental en organisant projections, festivals, rencontres (avec des cinéastes, des auteurs…), conférences et formations, ainsi que des ateliers pratiques d’initiation. Créé en 2000, Braquage est une association Loi 1901, animée par des cinéastes, des pédagogues, des programmateurs et des artistes.

Depuis une quinzaine d’années, Braquage a proposé environ 500 séances de cinéma expérimental, mêlant films historiques et contemporains. Les programmations ont lieu aussi bien dans des lieux alternatifs que dans des institutions (FEMIS, Cinémathèque française, Centre Pompidou, musées des Beaux-Arts, Forum des Images, Hôpital de Nanterre, Musée de la Danse…), ainsi que dans le cadre des festivals de Bobigny, Saint-Denis, La Rochelle, Belfort, Dreux, Châteauroux, etc. De manière plus générale, Braquage a présenté des séances à Lille, Strasbourg, Belfort, Saint-Étienne, Toulouse, La Rochelle, Rennes, Le Havre, Rouen… mais aussi à l’étranger (Europe, Etats-Unis, Brésil…).

Inauguration du Centre de Désapprentisage de la langue

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14. Octobre 2016 - 20:00» 22:00
Vendredi 14 octobre 2016, 20h

 

CENTRE DE DÉSAPPRENTISSAGE DE LA LANGUE

 


common infra/ctions
propose l'ouverture d'un Centre de Désapprentissage de la langue aux Laboratoires d’Aubervilliers. Le Centre sera inauguré par une électro-conférence, une présentation de la recherche en cours et un cocktail.

Interrogeant les automatismes et l'efficacité communicative et questionnant la position dominante des langues « majeures », le Centre de Désapprentissage de la langue se propose d'adresser plusieurs questions liées à la langue et à son rapport à l'identité et la communauté (notamment l’oubli, l’écholalie, la disparition, l’aphasie, les dehors du langage, le non-néegociable, le silence), à travers des ateliers, des dispositifs performatifs, des jeux, des lignes de fuite...



Inauguration du Centre le vendredi 14 octobre 2016 à 20h

Électro-conférence, partage de la recherche et cocktail
avec Igor Casas, interprète de signaux



 

 

Standard

Séminaire / Pratiques de soin et collectifs / saison #2

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Séminaire Pratiques de soin et collectifs
Deuxième saison.


                                           Mon bon ami, lui dis-je, aussi vrai que je
                                           suis moi et que vous êtes vous –
                                           Qui êtes-vous donc ? me dit-il.
                                           Pas de question embarrassante,
                                           répondis-je
.

                                           Laurence Sterne,
                                           Vie et opinions de Tristram Shandy
                            

   


Il me semble important de situer à nouveau la question du soin dans un paysage politique. Et ce paysage, on pourra l'appeler la crise qui nous est imposée. Et nous dirons avec d'autres que « la crise » n’est rien d’autre qu’un nouveau mode de gouvernement. Gouverner par la peur, par la mise en tension subjective, par la détermination d’identités sociales qui ne cessent en même temps d’être déstabilisées. L’impérieuse injonction à s’adapter à l’instable semble être devenu le mode de subjectivation promu par les institutions de gouvernance, à l’échelle de pays entiers, avec l'institutionnalisation de la précarité ou avec des lois d'urgence dévoilant le fondement policier de l'Etat. Ou encore à l’échelle des conduites individuelles, en faisant de la vie un travail anxieux de prospection. Voici que la seule communauté possible ne saurait-être que celle de l’expérience commune de la peur et de l’insécurité.   

Et pourtant nous savons que le mot crise est lié aussi, étymologiquement, au sens de prise de décision. Disons que la « crise » que nous vivons annonce des bifurcations inattendues comme autant de nouvelles voies d’émancipation. Et que nous sommes, à nouveau, de plus en plus nombreux à le vouloir ainsi et à agir en conséquence : que l’on occupe des places, que l’on "déborde" dans les rues ou que l’on expérimente des formes de coopération. Ou tout à la fois.

Il n’est plus possible d’en douter, l'illégitimité de ceux qui prétendent nous gouverner, et de leurs institutions, augmente radicalement la possibilité de cultiver des arts pour ne plus être gouvernés. A la logique intégrative (que ce soit par les institutions du marché –le salaire et la folle production de valeur qui détruit la pluralité de nos milieux de vie–, ou que ce soit par les institutions étatiques qui fabriquent des parcours et des identités normées, au demeurant introuvables), nous pouvons opposer la fragmentation de ce que l'on peut appeler avec d’autres de nouvelles formes  de « communalité ». A la gestion de la population comme une totalité administrée on pourra opposer des fabriques de communautés singulières. A la délégation de nos besoins institués par toute une microphysique du pouvoir, on peut opposer l’attention vers la singularisation de notre vie commune.   

On peut dire alors que le soin se situe au bord de la politique. Ce sont le soin et l’attention qui permettront que les frontières de la politique deviennent poreuses. Il s’agit alors de porter notre l’attention aux processus d’individuation qui permettent de situer les formes d'instauration du collectif et, en les situant, de frayer des passages entre des mondes.  Le soin est en ce sens la fabrique des différences d’où émergent des singularités conjurant les tentatives d’une unification ontologique.   

Si nous adoptons l’hypothèse que la politique surgit là où se produit un processus de désertion des identités policières qui rendent possible l’administration d'un certain ordre social, cela veut dire aussi que l’apparition de nouveaux régimes de sensibilité et d’énonciation collective amorcent la possibilité d'autres formes de communauté. Nous ne voulons plus d’un Sujet universel, serait-il le sujet de l’émancipation : nous savons le désastre auquel aura conduit l’instauration d’un sujet politique subsumant tous les autres formes plurielles de subjectivation.    

Misère de l’universalisme déjà fondé, conduisant à la désolante inattention au regard des milieux de nos coexistences. Soigner, guérir, ce sont des processus instituant la différence. C’est par des formes transindividuelles qu’émergent des nouveaux modes d’existence de l’expérience. Alors, une écologie du soin suppose l’expérimentation de relations avec les autres et les autres des autres : un tissage de relations. Il faut repeupler le monde de la variété infinie des relations entre les êtres. Prendre soin, c’est accompagner des formes hétérogènes de co-individuation.    

Ce qui nous intéresse donc, ce n’est ni "le tragique sujet du manque-à-être", ni le souci de soi boursoufflé par un idéal de santé, ni non plus l’individu hyper-compétent, frénétiquement "activé" dans l'adaptation au monde de l'économie. Ce qui nous importe ce sont les dispositifs d’expérimentation de rapports entre les êtres, humains et non-humains, qui fabriquent des nouveaux mondes ou qui inventent les manières d’hériter des mondes anciens. On ne soigne pas des « individus » ni des  « sujets » mais on prend soin des relations auxquelles nous appartenons. Ici, pas de sujet précédant la relation instaurée, pas de neutralité possible, pas de « témoin modeste » de l’objectivité du monde, selon les mots de Donna Haraway, mais un engagement commun dans des processus d’émancipation qui sont, simultanément, la singularisation de nos relations et un travail  collectif pour situer ces relations: l'instauration de lieux

Voici la tentative qui guidera le cycle de rencontres que nous proposerons lors de cette deuxième saison du séminaire autour du soin et des pratiques collectives. Faire exister des constitutions collectives plurielles, le partage de nos expériences, suppose aussi un exercice fragile et risqué de désassignation aux identités déjà normées (celles purement fantasmatique de certaines formes de médecine, de psychiatrie, de psychanalyse, de sociologie ou de la justice). S'il s’agit de refuser le pastoralisme gouvernemental, ou la prétention pédagogique de quelques uns à dicter aux autres les manières de la bonne émancipation, c'est que le soin est une fabrique de la différence.
   

Après une séance d'introduction que je partagerai avec Thierry Drumm, philosophe pragmatiste, lecteur attentif de W. James, nous nous pencherons avec d'autres invités sur des pratiques néo-chamaniques, sur l'introduction du candomblé en France, sur la réinvention d'une friche dans la banlieue parisienne, sur les pratiques des groupes d'entraide mutuelle à la bordure de l'institution psychiatrique, sur la mise en place de groupes d'auto-support de personnes atteintes d'une maladie somatique, sur la mise en place d'un centre social autonome, sur nos rapports aux plantes qui habitent nos milieux urbains, sur l'usage d'une ambulance achetée collectivement... Cela devrait nous permettre de commencer à dessiner une sorte de cartographie de pratiques plurielles de soin et d'attention comme autant de formes d'émancipation.
   

Ces rencontres auront lieu comme d'habitude les derniers jeudis du mois aux Laboratoires d'Aubervilliers, à partir de 19h.

Les dates prévues, dont nous annoncerons le contenu ultérieurement, sont les suivantes: les jeudis 27 octobre, 24 novembre, 15 décembre 2016, puis les jeudis 26 janvier, 23 février, 30 mars, 27 avril et 25 mai 2017.

 




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