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Fragment d'une conversation avec Sylvain Lazarus

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Fragments of a Conversation with Sylvain Lazarus

Anthropology of the Name




The audio material used for this audio piece belongs to earlier private recordings made alongside a series of conversations with the French sociologist, anthropologist, political theorist, and philosopher Sylvain Lazarus.

The conversations synthesized in this capsule took place last February, on the 13th and 17th to be more precise, when an awaited encounter with Sylvain Lazarus took place. Oscar Fernández and I (Paloma Polo) had arrived much earlier to a café in Boulevard du Montparnasse (Paris), were Lazarus had scheduled our meeting. Jaime Sepúlveda, a Chilean artist, friend and collaborator of Sylvain, kindly mediated the discussion as translator.

Our interrogations crystalized in a question yet to be elucidated: is it possible for art and politics to coexist and relate in an egalitarian manner when tackling our contemporary reality? We wondered if such a relation would be at all possible for Sylvain, always in favor of separation, a thinker of singularity. In this regard, and despite the differences particular to our respective intellectual domains, we had also come oppose, in words of Lazarus, the “academicism of the disciplines as they dismiss the very idea of a specific space of intellectuality of people”.

Oscar and I had been devoting time to thinking the ideological paradoxes and deadlocks of contemporary art and what an overhaul of art, as it were, could be. In so doing we had converged with many of Lazarus’ claims.

Sylvain had devoted all of his life to politics. Together with Natacha Michel and Alain Badiou, among others, he founded a Marxist Leninist organization following the May 68 uprisings, and later, a post-Leninist organization called L’Organisation Politique, which called itself a post-party organization and was informed by a new seizure of politics established by Lazarus and formulated as politics in interiority.

Oscar and I had wondered if the two central propositions (and problematic decisions) of his seminal work, Anthropology of the Name, could orientate the proceedings of an art project. His protocol of inquiry would be: "1. People think. 2. Thought is a relation of the real. It posits the existence of a reality (a requirement for any rational investigation) and of a non-objectal reality".

We are now in 2016 and Lazarus has traversed and experienced almost all possible revolutionary and progressive forms of politics. He carries on, working together with people, activists and students from various backgrounds, diverse occupations and engagements with different problematics. They issue from time to time an austere publication: Cahier des Quelque-uns. The signatures of the articles don’t contain surnames. Part of what they do is investigations into what Lazarus calls problematical words, he affirms that the possible arises when people decide on these words. We are interested in this method of inquiry.

 

Paloma Polo

 





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Réalisation :  Paloma Polo

Voix principale en français : Sylvain Lazarus
Traduction et interprétation simultanée en castillan : Jaime Sepúlveda
Intervention en castillan : Oscar Fernández et Paloma Polo

Cette pièce audio a été éditée et produite par la Radio du Musée Reina Sofia à Madrid

 

 

 

 

 

 

 


Habiter pour créer / ouverture publique

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24. Février 2017 - 20:00» 22:30
Vendredi 24 février 2017, 20h

 

 

Habiter pour créer se place dans la continuité du projet Pour une Thèse vivante initié par l’artiste en 2011 et dont la matière, constituée par les différentes formes d’enseignement, de réflexions, de recherches et de rencontres traversées par Claudia Triozzi, s’enrichit progressivement.

Cette ouverture publique aux Laboratoires d'Aubervilliers est une invitation à venir partager, les recherches en cours de Claudia Triozzi et à faire fructifier un dialogue extérieur/intérieur, ici/ailleurs constitutif de ce projet pour inventer une manière de revenir à la terre, à l’autre, ainsi qu'à l’expérience du corps.



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Entrée libre sur réservation à
reservation@leslaboratoires.org ou au 01 53 56 15 90

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Assemblage d’exposition, résidence Espace Darja, Casablanca - 2016

 


Camping, CND à Pantin, 2016 - photo : Claudia Triozzi




Standard

Présentation

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g.i.g.


« Nous aussi on veut notre part du ghetto ! »
S. Chiambretto, Y. Thommerel



Formidable générateur de fiction, le «ghetto» est convoqué singulièrement ces derniers temps dans les champs de l’art, des médias et du discours politique. Soucieux de ne pas être hors-jeu, Sonia Chiambretto et Yoann Thommerel s’emparent du terrain, et s’associent au Groupe d’information sur les ghettos (g.i.g.).


Centre aux missions modulable pour certains, difficilement situable, boîte noire pour d’autres, le g.i.g rassemble documents textuels, sonores ou visuels sur les ghettos, et se définit comme un ensemble ouvert : « Pour tout point a de E : tout sur-ensemble d'un voisinage de a est lui-même voisinage de a ; l'intersection de deux voisinages de a est elle-même un voisinage de a ; E est un voisinage de a ; tout voisinage de a contient a ; pour tout voisinage V de a, il existe un voisinage W de a tel que V soit voisinage de chacun des points de W.»


En résidence aux Laboratoires en 2016, Sonia Chiambretto et Yoann Thommerel fondent in situ un nouveau groupe d’information composé d’habitants d’Aubervilliers dont les modalités d’actions sont notamment la création de protocoles d’enquêtes et de leurs modes de circulation : diffusion, récoltes de données, traitements.


A cette occasion, ils proposent deux types de rencontres qui s'articuleront les unes les autres.

D'une part, une série d'ateliers d'écriture de questions et dont la dernière date a été programmée le lundi 25 avril 2016. Les prochaines dates seront communiquées ultérieurement.

D'autre part et de manière complémentaire, une série de soirées publiques de lectures et de performances conçues en rapport avec les archives collectées seront proposées tout au long de leur résidence. La première soirée a été programmée le vendredi 12 février 2016 et a réuni Anne-Sarah Huet (poète, économiste) et Philippe Artières (écrivain, historien). Trois prochaines soirées sont à venir entre octobre et décembre 2016.



 

 

Entretien Claudia Triozzi et Smaranda Olcèse

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Habiter pour créer
Entretien Claudia Triozzi et Smaranda Olcèse



SMARANDA OLCESE — Vous créez Pour une thèse vivante en 2011, en réaction aux accords de Bologne qui instituent l’obligation au niveau européen, pour les élèves des écoles d’art, de rédiger un mémoire afin de valider leur diplôme. Quel type de relations à l’écriture Pour une thèse vivante vous permet-elle d’explorer ?

CLAUDIA TRIOZZI — Je me suis emparée de cette question de l’écriture aussi bien en tant qu’enseignante d’école d’art qu’en tant que personne qui crée. Je l’ai prise comme une ouverture. Néanmoins, mon territoire reste la scène. Si écriture il y a, alors c’est l’écriture même de matériaux qui m’ont intéressée et qui m’ont aidée à créer des pièces.
Pour une thèse vivante, en 2011, rassemblait, sur le plateau, des bribes de textes, des vidéos, mais aussi des invités en chair et en os – des psychanalystes, des historiens de l’art, des artistes – et un âne. Beaucoup de problématiques soulevées lors de ce premier épisode sont encore aujourd’hui très pertinentes : la vulnérabilité, par exemple – une question toujours ouverte, qui faisait, à l’époque, écho aux développements d’Esther Ferrer concernant le cri, l’artiste affirmant qu’elle souhaite parfois que ce qu’elle dit ou fait soit entendu tel quel et pas autrement, serré, court, comme un manifeste. Par la mise en scène des pièces, je suis arrivée à une parole qui se situe en deçà du récit, qui refuse de signifier ; pourtant, des mots-clés se détachent au fur et à mesure, permettant l’analyse des créations et définissant l’axe de l’agir dans le sens d’un aller vers, d’une dynamique, sans pour autant les spécifier. Voici le sens de Pour une thèse vivante. À partir de là, les questions liées à l’écriture ont été résolues : l’écriture vient après, pour ouvrir, dans les corps, des espaces de créativité, et non pas pour finir ou figer un travail. Aujourd’hui, je ne voudrais pas banaliser cet acte en épuisant des matériaux préexistants. Il est essentiel que je puisse maintenir une démarche de recherche. Poursuivre Pour une thèse vivante a du sens seulement si je continue de fabriquer, en parallèle, des pièces de répertoire.
Le fragment a certes à voir avec la logique interne de Pour une thèse vivante. La fabrication de chaque épisode implique quelque chose de passionnel : des temps fragmentés, plus courts, des matériaux déjà partiellement élaborés et donc plus ouverts. La pédagogie, l’ouverture à l’autre, mais aussi l’aspect psychique – la manière dont je m’investis dans le processus de création – sont également très importants.
Quant à la possible inscription de Pour une thèse vivante dans un cadre universitaire, elle suppose que je trouve une personne susceptible d’accompagner ce projet. Autrement, être dans un manifeste, en dehors de l’enseignement officiel m’intéresse également. Néanmoins, je pense qu’à un moment donné il faudrait mettre en scène une soutenance – avec un vrai ou un faux diplôme. Mais il y a d’autres expériences que j’aimerais faire avant de pouvoir dire : voici ma thèse !

SMARANDA OLCESE — À quel endroit situez-vous la distinction entre les processus de création impliqués par une pièce et ceux mobilisés par un épisode de Pour une thèse vivante ?

CLAUDIA TRIOZZI — Faire une pièce, c’est plonger dans l’inconnu : des choses surgissent en moi, il y a aussi des questionnements qui reviennent, quelque chose se construit. Je dois trouver la forme plastique, ce que je vais partager de mes recherches… Tout cela prend du temps. Ce n’est pas le même processus. Pour une thèse vivante est une manière pour moi d’archiver mes pièces : je peux en reprendre des passages, interroger des matières, tisser des liens à partir de ces matériaux vers d’autres personnes.
Pour une thèse vivante est un flux d’énergie qui échappe parfois, parce qu’il se construit dans une autre économie temporelle. Il s’agit d’un manifeste : faire signe depuis l’endroit où nous sommes et avec ce que nous faisons.

SMARANDA OLCESE — Revenons un instant aux premiers désirs qui ont conduit au mûrissement de Pour une thèse vivante en 2011.
 

CLAUDIA TRIOZZI — J’étais en résidence au Musée de la Danse, Centre Chorégraphique National dirigé par Boris Charmatz, à Rennes. Je suis partie du titre. Il s’agissait de réactiver des séquences de mes pièces antérieures, parce qu’elles n’avaient pas été suffisamment vues. Pour une thèse vivante est finalement une façon de réinterpréter des passages de mes travaux antérieurs que j’ai encore envie de jouer, qui me parlent toujours. C’est une manière pour moi de me donner une autonomie, de décider moi-même quoi rejouer et comment.
Pour une thèse vivante me permet de convoquer des états très disparates que j’ai pu parcourir entre les différentes créations : qu’est ce qui m’a amenée à faire la pièce suivante ? Comment cela s’est-il fait ? Dans quel type d’énergie étais-je ? Dans quelle situation de vie, même hors métier ? Pour une thèse vivante me permet de repenser mon parcours de vie, finalement, en plus de celui de scène.
Au fur et à mesure que j’avançais dans les épisodes suivants, le désir s’est précisé de commencer à y soustraire mes pièces, à ne plus utiliser le passé, à rester dans quelque chose de plus proche de ce qui est en train d’advenir.

SMARANDA OLCÈSE — Parlons justement des dynamiques de fond qui reviennent au fil des différents épisodes.

CLAUDIA TRIOZZI — Pour une thèse vivante a en soi une modalité très difficile : le projet se construit chaque fois avec très peu d’argent, sur un temps assez court, plus souvent à la maison que sur le plateau. La mise en tension de toute cette dynamique entre les vidéos, les divers matériaux et les invités demande une détente et une disponibilité absolues, présuppose d’accueillir et d’accepter les accidents qui peuvent survenir sur scène. Le travail se construit aussi à partir de ces accidents.
Pour une thèse vivante, c’est le rebondissement de ce qui advient au moment où ça advient. Ce qui me passionne, dans cette démarche, c’est aussi de faire sens avec des choses disparates, observer quelle en est l’épaisseur et comment ces choses s’entrelacent, quel type de pensée en surgit.

SMARANDA OLCESE — Des figures disparates structurent chacun des épisodes de Pour une thèse vivante. Le psychanalyste, les artistes, le boucher, le tailleur de pierre, le modèle et l’âne constituent la trame mouvante du premier épisode, créé à la Ménagerie de verre en 2011. Un deuxième épisode a eu lieu à Bologne, en 2012. Avanti tutta (Pour une thèse vivante) , qui est le troisième épisode créé à la Ménagerie de Verre en 2014, s’articule autour d’une ancienne actrice de Hollywood, d’un faiseur de nœuds, d’un mannequin, d’une chanteuse. Comparses (Pour une thèse vivante) enfin, épisode 4 créé au Louvre en 2015, mobilise des historiennes d’art et des restauratrices. Quelles sont les grandes thématiques qui reviennent, et selon quelles déclinaisons ? La question de la représentation se pose aussi bien concernant le monde du travail que par rapport à l’histoire de l’art.
 

CLAUDIA TRIOZZI — Les recherches liées aux représentations du monde du travail et des différents savoir-faire ont été initiées en 1999 avec Dolled up qui marquait une tentative de réinvestir d’autres métiers que le mien et de les mettre en scène. Cela ne s’est jamais limité aux simples gestes du métier (même si on a souvent souligné cet aspect de mon travail). J’ai toujours considéré le geste en relation avec une façon de se représenter, d’être en communication, en relation avec son environnement. D’où l’importance de la parole, dans mes projets. Il s’agit d’un ensemble où le geste est relié à une pensée de soi, parfois volontairement bridée. Ce qui m’intéresse, c’est de regarder du côté de ces blocages. Je cherche cette pensée en acte qui se compose de tous ces éléments. Ma démarche revendique également une tentative d’abolir les hiérarchies, sans pour autant soutenir que nous sommes tous semblables ni rechercher une homogénéisation.

Interview de Claudia Triozzi avec le faiseur de nœuds Antonio Lamonica dans la pièce
Avanti tutta (Pour une thèse vivante)
, 3e épisode, présenté à la Ménagerie de verre en 2014

Le nœud capucin

          Antonio :  Vous n’avez jamais vu la corde des capucins ?
          Claudia : Peut-être, mais je ne m’en souviens pas bien.

          Antonio : Alors celui-ci, c’est un nœud facile !
          Claudia : Ah voilà !

          Antonio : Il peut être… ça, c’est le nœud de capucin.
          Claudia : Le nœud de capucin sert quand quelqu’un veut s’échapper
          et qu’il lance la corde de sa fenêtre.
          Antonio : Oui, un nœud d’arrêt, oui.
          Claudia : Où l’on peut poser les pieds !

          Antonio : Exactement.
          Claudia : Et comment s’appelle-t-il ?
          Le nœud de capucin sert à s’enfuir ?

          Antonio : Non, il s’appelle comme ça car il est utilisé par les
          capucins.
          Claudia : Et que font-ils, avec ce nœud ?

          Antonio : Vous voyez la cordelette avec laquelle ils nouent
          leur bure ?
          Claudia : Oui.

          Antonio : Sur le côté, il y a…
          Claudia : Des nœuds !

          Antonio : Voilà, c’est ça !
          Claudia : Ah ! J’ai compris ! Comment s’appelle-t-il ? Nœud de
          capucin ? Alors, je peux dire que les capucins ont toujours sur eux
          un nœud qui leur permet de s’échapper ?

         Antonio : Non.
         Claudia : Non ? C’est une métaphore mais elle ne vous plaît pas.

         Antonio : Mais non, figurez-vous !
         Claudia : Moi, il me semble que le capucin, et je ne le savais pas, a
         cette corde qui lui permet de s’échapper. Ils ne sont quand même
         pas idiots, si je puis dire.
         Non mais c’est intéressant !

         Antonio : C’est un nœud qu’ils ont sur le côté. Je crois, je n’en suis 
         pas sûr car je ne suis pas religieux, que le nombre de nœuds
         représente le grade hiérarchique : plus il y a de nœuds, plus ils sont
         importants dans la hiérarchie.
         Claudia : Donc, le nœud de capucin, très, très beau. Il me plaît
         beaucoup, d’autant plus que ces capucins
sont malins, je le savais,
         j’ai toujours pensé qu’ils étaient malins, ces capucins. De vrais petits
         malins.


Les différents épisodes de Pour une thèse vivante ont marqué un glissement de l’incarnation par moi-même des différents métiers vers des invitations sur scène à des personnes qui exercent véritablement ces métiers, dans l’optique d’une passation de rôles.

Quant aux connexions avec l’histoire de l’art, elles se font naturellement, grâce aux invitations. La coupe du boucher peut nous ramener à des œuvres picturales, à des performances des années 1970, à des questionnements philosophiques, aux sciences. Chaque savoir-faire déploie son expressivité, témoigne d’une certaine créativité. Le geste du tailleur de pierre s’inscrit dans un temps plus long, fait signe vers une autre disponibilité du corps à la matière. Je suis intimement convaincue que l’histoire de l’art nous traverse, que nous la portons en nous-mêmes de manière inconsciente. Je préfère donc construire des objets scéniques avec des matériaux communément considérés en dehors du champ de l’art.

L’âne constitue le point obscur de la représentation, l’échappée – personne ne saura dire exactement où il en est. C’est un être qui fait signe vers l’inconfort et l’impulsivité : il brait, il chie, il pisse, il réagit à sa propre peur, tente de s’en défaire de manière virulente. Sa présence sur le plateau lors du premier épisode de Pour une thèse vivante, en 2011, me permet aussi de parler des excréments, cette matière qui habite le corps, cette production qui ne s’arrête que par la mort. Le morceau de viande composée – l’aloyau travaillé par le boucher – favorise des connexions liées à la peur, à la vulnérabilité, au fait de subir. Et, d’une certaine manière, je me reconnais dans ces états : sur scène, je traverse des moments d’inconfort, de vulnérabilité. Je partage cette dynamique avec mes invités : nous faisons ce que nous ne savons pas faire. C’est une véritable méthodologie : aller au-delà de soi, se décaler, dépasser ses compétences, ce sont des endroits où, souvent, la pensée devient fertile.

SMARANDA OLCESE — Pouvons-nous nous attarder sur l’usage que vous faites de la vidéo ? Dans chacun des épisodes de Pour une thèse vivante, certains invités sont présents sur le plateau en chair et en os, alors que d’autres y sont conviés à travers la projection de vos échanges filmés. Quel type de relation la caméra permet-elle d’instaurer ?

CLAUDIA TRIOZZI — Ces échanges mettent en jeu des questions qui permettent d’aller davantage vers l’autre. Pour une thèse vivante cherche cette parole qui échapperait à l’autre. Il s’agit d’affirmer, de se confronter à cette affirmation et de travailler à cet endroit. La caméra me permet de m’approcher, je filme jusqu’au grain de la peau. C’est un corps à corps qui s’engage – être dans le mouvement de l’autre, dans la parole de l’autre.

Interview de Claudia Triozzi avec Mme Juliette Levy, restauratrice d’œuvres
Comparses (Pour une thèse vivante), 4e épisode, présenté au Louvre en 2015

Faire corps

          Claudia : Qu’est-ce que restaurer fait à notre propre corps ?
          Marie-Madeleine étant aussi une femme, quelle relation s’instaure
          avec soi-même pendant la restauration ?
          Juliette : C’est vrai … Ça me frappait beaucoup à l’époque, à
          chaque fois qu’on disait : j’ai découvert un morceau, là – et on le
          montrait sur notre propre corps, plutôt que sur celui de la sainte
          Madeleine pour expliquer. C’est vrai qu’il y a une sorte de renvoi
          du corps de la sculpture vers nous. C’est très intéressant de voir
          comment elle est faite, comment elle est sculptée. Évidemment, elle
          a un corps idéalisé, très beau , mais c’est vrai qu’il y a cet écho
          entre les deux corps. Comme je vous le disais, les polychromies
          superposées, avec la polychromie originale, faite en plusieurs
          couches et puis les repeintures du XVIIe et du XIXe, ce sont comme
          des peaux. C’est très intéressant de retirer la peau récente pour
          retrouver la peau d’origine, ça fait rêver !

          Claudia : Restaurer, c’est aussi tenter de se replonger dans le geste
          de la personne qui a créé l’œuvre ?
          Juliette : Oui, c’est vrai … Tout à fait. On a vraiment les yeux fixés
          sur chaque relief de la sculpture. À force de les voir, ces reliefs, on
          comprend comment ils ont été faits, si l’artiste a été vite ou
          lentement, s’il est revenu, s’il y a repentir, s’il a essayé d’enlever
          un
défaut du bois, si sa lame était affûtée ou si elle avait un
          défaut…

          Quels sont les outils, les gestes, les difficultés qu’il a rencontrés. Et
          pour la sainte Madeleine, le fait de vider le buste – il fallait d’abord
          faire un trou, puis taper, au début, ça devait être assez facile, mais
          après, évider sans percer les parois du bois – ça a été très bien fait
          ici, mais souvent, sur d’autres sculptures allemandes de la même
          époque, on voit que le sculpteur a percé et qu’ensuite, il a mis une
          petite pièce, par exemple. Effectivement, retrouver ce geste est
          extraordinaire, voir comment il a raisonné, par quoi il a commencé,
          etc. Et on est un peu dans son esprit, pour certaines parties de son
          travail, je ne dis pas qu’on comprend tout, mais il y a toute une
          partie qu’on retrouve, et on est transporté, presque à côté de lui,
          par l’imagination, et ça fait rêver complètement, le restaurateur, de
          retrouver tout cela et d’être dans cette proximité avec le sculpteur
          ou le polychromeur. Et cette proximité est extraordinaire, parce
          qu’on traverse le temps et qu’effectivement, on rêve. Cela fait
          complètement planer.

          Claudia : Si je dis  « être dans le geste de l’autre » ?
          Juliette :  Aussi ! Être très proche de lui, se comprendre à travers
          le temps. C’est très bénéfique. Parce que la restauration est
          bénéfique pour le restaurateur aussi : on a l’impression qu’à travers
          les siècles, les gens se comprennent et ça crée presque des liens.

Être dans la vie de l’autre pour un moment, c’est une sorte de performance à deux, je l’accompagne, je le mets à l’aise de par mon travail du corps et de l’écoute. Les questions s’inventent au fur et à mesure, je m’accorde la liberté de certains glissements, je suis à l’affût de la sensation du moment, de mes perceptions, de l’intuition.

Les invités sont avant tout des visages et des corps, à l’instar des acteurs, fussent-ils non professionnels, du cinéma néoréaliste italien aux films de Pialat. Je vais peut-être mettre en avant cet aspect qui leur appartient en propre. Je ne les considère surtout pas comme amateurs. Le boucher que j’invite n’est pas un amateur, il est boucher sur scène. C’est une question d’accent, mais ce n’est pas pareil ! Je convoque chacune de ces personnes à un endroit précis. Cette question du dépassement des compétences m’intéresse.

Dans cette perspective, je pourrais dire que Pour une thèse vivante est une archive de soi, constituée de fragments des pièces de répertoire, mais aussi d’une recherche de visages. Les mots interprètes ou encore interviews ne disent pas assez l’intensité de ces rencontres, je préfère parler de visages – visages liés à des savoir-faire.

Interview de Claudia Triozzi avec Gianna Serra, actrice de cinéma
Avanti tutta (Pour une thèse vivante)
, 3e épisode, presenté à la Ménagerie de Verre en  2014

J’ai dit non

          Gianna : Mais moi, j’ai essayé de faire de mon mieux, la seule
          chose q
ui me désole, c’est que ce travail, je ne l’ai jamais vraiment
          pris a
u sérieux, voilà. Je l’ai fait par-dessus la jambe.

          Claudia : Comment ça ? tu me disais que…
          Gianna : En disant plein de « non », j’ai dit tellement de « non ».
          J’ai dit non à Fellini, j’ai dit non à Garinei et à Giovannini. Hélas, à
          lui aussi. Mais j’ai dit tellement « non ».

          Claudia : Et pourquoi tous ces « non » ?
          Gianna : Parce que… j’ai privilégié ma vie privée plutôt que les
          tournages.

          Claudia : Ta vie privée… mais, tu as fondé une famille ?
          Gianna : Non, je ne me suis pas mariée, mais même si tu ne passes
          pas devant le prêtre, tu peux avoir une vie sentimentale.

          Claudia : Non, c’est vrai, mais je veux dire, parfois, on… fait des
          enfants, on fonde une famille…
          Gianna : Non, je n’ai pas d’enfants, mais bon, ma vie sentimentale
          est passée avant le cinéma.

          Claudia : C’est vrai ? Vraiment ?
          Gianna : Oui. Tu me peux me croire. J’ai dit tellement de « non ».

          Claudia : Et après tu l’as regretté, non, non ?
          Gianna : Non, ça s’est fait comme ça et… ça devait se passer
          comme ça.

          Claudia : Tu as dit « non » parce que tu vivais des choses
          importantes.
          Gianna : Bien sûr. Rien ne justifiait de laisser tomber une chose qui
          me donnait tellement de joie.


Un Consiglio

          Claudia : Alors que me donnerais-tu comme conseil ? Une femme
          qui ne fait pas de cinéma mais qui fait de la scène et qui a déjà un
          certain âge. C’est moi, cette femme !
          Gianna :À toi ? Mais tu joues encore à la marelle !

          Claudia : Comment ça, je joue à la marelle ?
          Gianna : Mais tu es une petite fille, toi !

          Claudia : Moi, une petite fille ?
          Gianna : Eh oui, tu joues encore à la marelle.

          Claudia : Oui ?
          Gianna : Non. Moi, en revanche. Non, écoute, moi, d’après ce que
          j’ai pu comprendre, tu es une jeune fille très douée. Heu… tu dois
          avoir les idées très claires et tu dois avoir, heu… quelqu’un qui te
          finance parce que sinon, où tu vas ? Non ?  Et ensuite, je pense
          que tu es pleine de ressources, et « vouloir, c’est pouvoir ».
          Et puis, écoute, ceci vaut pour tout le show-business : dans ce
          travail, il faut de la chance, de la chance et de la chance. Parce que
          2 +2 =8… Dans ce métier 2 +2 =8, ce n’est pas l’industrie ni la
          banque. La chance, se trouver au bon endroit avec la bonne
          personne.

          Claudia : 2 + 2 = 8 dans le sens que ça ne fait pas 4 ?

Ce type de recherche croise régulièrement mes pièces, c’est la façon la plus directe que j’ai trouvée de construire une relation à l’autre, d’aller vers lui et d’envisager qu’il puisse être partie prenante de mon travail artistique. À partir de ce moment-là, on ne parle plus de soli, mais de personnes qui m’accompagnent. Lancé à leur recherche, mon corps devient performatif même en dehors de la scène. Ce n’est pas toujours simple. Il en va pourtant d’une énergie, d’un désir à la fois intellectuel, cérébral, mais aussi profondément intégré au corps. Cela tient de la nécessité. Tous ces gestes qui préparent la rencontre tout en restant en dehors du plateau sont essentiels, même si, apparemment, ils s’éloignent de l’acte artistique. Je suis moi-même engagée dans une dynamique de dépassement de compétences, je me mets dans un endroit à partir duquel je peux atteindre ces personnes.

SMARANDA OLCÈSE — La plupart de vos créations, et notamment les différents épisodes de Pour une thèse vivante, posent une relation forte entre la scène et son hors-champ, la vie quotidienne. Qu’en est-il de cette dialectique intérieur/extérieur à l’œuvre dans vos pièces ?

CLAUDIA TRIOZZI — Aller vers, c’est aussi s’échapper. Agir en dehors du plateau de danse permet aussi de décliner l’obligation de construire quelque chose qui ne serait pas tout à fait lié à la réalité. Il s’agit de se confronter à la vie, de montrer que ces histoires d’expériences que je vais chercher comptent, qu’elles ne sont pas anodines, qu’elles ne sont pas si communes que ça, qu’elles recèlent chacune quelque chose d’unique et de singulier, d’important.

SMARANDA OLCÈSE — Votre prochaine création, dont le titre de travail est Habiter pour créer, va s’articuler autour de la question de construire un lieu pour soi.

CLAUDIA TRIOZZI — Effectivement ! Un lieu dans ses dimensions physiques, architecturales, artistiques et pédagogiques, proche de ce que je suis à ce moment donné. J’ai appris à identifier ce qui ferait progresser le travail, le mien comme celui des autres. Car dans le désir de ce lieu, l’aspect de l’invitation est essentiel. Produire, certes, mais aussi ouvrir à la recherche. Ouvrir également ma façon de penser. J’imagine un lieu avec des jeunes personnes qui puissent expérimenter une multiplicité d’aptitudes à soi – réaliser qu’on peut y accéder avec plus ou moins de peine, selon les endroits. Le dépassement des compétences se traduit aussi par cette aptitude à soi. Il va s’agir de développer un maximum de potentialités. Aller vers soi, c’est expérimenter les possibles pour choisir ensuite l’endroit de notre action. Il est essentiel de laisser du jeu, de permettre que tout cela soit mouvant.

Aujourd’hui, j’ai le désir d’un lieu. Habiter pour créer me conduit sur d’autres territoires. L’expérience artistique et pédagogique a peut-être besoin de se renouveler. J’ai besoin d’aller ailleurs, de chercher d’autres énergies, d’autres formes de communauté, d’autres corps, d’autres espaces, d’autres climats, d’autres modes de vie.

SMARANDA OLCÈSE — Quel sens peut prendre le syntagme communauté, dans ce contexte particulier ?

CLAUDIA TRIOZZI — Le terme communauté me fait effectivement peur. Je l’entends uniquement dans le sens de son inscription et son ouverture à d’autres espaces de recherche.

La pédagogie liée à l’enfance, pour prendre un exemple, a commencé à m’intéresser suite à cette expérience faite au Maroc avec des enfants dans une oasis. Nous avons partagé des moments de folie, de dépassement de soi incroyables. La pédagogie entendue dans le sens, non pas de l’impératif de bien faire, mais d’acceptation de ses propres énergies – il s’agit d’en jouer, et non pas de les éduquer –, c’est à cet endroit précis que se situe pour moi l’acte pédagogique. On ne peut pas freiner les énergies indéfiniment, mais les comprendre : qu’est-ce que cette énergie ? Quel est son point d’épuisement ? Observer comment on peut être engagé ensemble dans la même action, tout en dégageant ses propres énergies. Le fait d’inviter des personnes que je ne connais pas me permet aussi d’observer, j’apprends toujours, je ne suis plus au premier plan, je peux me retirer et observer. Au Maroc, j’ai transmis à Safa, la personne en charge du groupe d’enfants, des exercices, et je me suis tout de suite retirée derrière ma caméra. J’ai filmé en caméra subjective, car ce qui m’intéressait était de capter quelque chose de cette transmission de pédagogie.

L’enjeu est, une fois de plus, de remettre en question les hiérarchies. Les enfants ne sont pas encore formatés. J’aimerais qu’ils soient présents dans les espaces où des adultes sont en train de chercher. Imaginer des actions où adultes et enfants agissent ensemble serait passionnant. Mon expérience m’amène au désir d’avoir un lieu et de porter son projet. Aller vers des personnes qui n’ont pas fait l’expérience d’un lieu d’art ou de danse… Sortir des sentiers d’une pédagogie institutionnelle, s’engager dans une pédagogie de recherche.

SMARANDA OLCÈSE — Vous imaginez, parallèlement à Habiter pour créer, son corollaire : Un CCN  en terre et paille. De quelle manière cette nouvelle création s’inscrit-elle dans la continuité de Pour une thèse vivante ?

CLAUDIA TRIOZZI — Un CCN en terre et paille est un manifeste, à l’image de Pour une thèse vivante, dont la matière s’enrichit progressivement. L’enseignement, la réflexion, la recherche, je voudrais désormais les partager, les mettre en jeu de manière pratique, extrêmement concrète, dans la construction même de ce lieu. Ce nouvel épisode est un manifeste concret. Il y a des syntagmes qui se formulent avant l’objet. Ce titre s’est imposé à moi suite à l’invitation au sud du Maroc, où se pratique encore la construction des habitations en terre et paille. Il y a certes une dimension écologique, mais ce n’est pas ce qui prime. Il s’agit de s’opposer au béton, bien sûr, mais pour affirmer un refus de l’institutionnel.

SMARANDA OLCÈSE — Lors des épisodes antérieurs de Pour une thèse vivante, les invitations se faisaient pour la scène. Un CCN en terre et paille resitue la rencontre à l’extérieur, dans la ville. Pouvons-nous évoquer la matérialité de ce nouveau geste artistique ?

CLAUDIA TRIOZZI — L’invitation serait de participer concrètement, littéralement à cette construction. J’imagine ce CCN en terre et paille dans un contexte proche de celui de jardins partagés, dans les fissures, dans les interstices du tissu urbain, même s’il s’agira seulement de construire un espace de 20 mètres carrés. Ce serait un lieu pour expérimenter, pour lancer des invitations à des jeunes danseurs et artistes. Nous allons le bâtir ensemble, par nous-mêmes, car ce type de construction est à la portée de nos mains, ne demande pas de savoir-faire spécifiques.

SMARANDA OLCÈSE — Le Japon, le Brésil, le Maroc semblent être autant de sources d’inspiration pour la conduite de ce projet. Que traquez-vous dans chacune de ces expériences, en tant que réflexion sur les matériaux, sur les espaces et les modes d’habiter ?

CLAUDIA TRIOZZI — Au Japon, j’aime bien la relation du corps avec des espaces très réduits, j’aime bien les matériaux, j’aime bien le traitement de l’espace vide, de la lumière. Je souhaiterais que le CCN en terre et paille soit réfléchi avec un architecte japonais. Mon désir est d’aller dans les campagnes, dans des lieux où la construction en terre et paille se pratique depuis longtemps, et d’essayer de comprendre comment les gens y vivent. Tout un questionnement autour du corps, de l’habitat et du paysage est à l’œuvre.

SMARANDA OLCÈSE — Qu’en est-il du Maroc ? Revenons un instant sur vos expériences dans cette oasis au sud du pays ?

CLAUDIA TRIOZZI — Tout est parti d’une résidence d’artistes à Casablanca.

J’ai été invitée à descendre au sud du pays, dans une oasis. C’était l’occasion pour moi de découvrir ces régions éloignées de la côte que je trouve magnifiques : les portes du désert. Ce paysage, de par son dépouillement, m’a contrariée dans un premier temps : rien que des dunes, et puis ces maisons en terre et paille, rouges comme la terre dont elles sont faites. Ces maisons ont des patios ouverts vers le ciel – on peut être chez soi et regarder les étoiles ! La relation au climat et aux éléments est très directe, le corps y est exposé. Je suis passionnée par cette organisation de la vie domestique, par la place des animaux dans le quotidien. On vit avec les animaux, et cela me plaît énormément. J’ai déjà travaillé avec les animaux sur scène, il y a des connexions qui s’imposent. C’est une prise de conscience de la vie de ces gens chez eux, dans leur environnement. J’ai été touchée, surtout, par l’intelligence et la sobriété de cet habitat : très peu de choses, des maisons presque vides, des volumes épurés. J’ai observé des choses très belles : on peut faire un feu dans ces maisons car le toit est ouvert. Je me suis posé des questions sur les divers modes d’habiter un espace. Les énergies possibles sont très différentes. Cela ramène le corps en jeu.

À l’intérieur de cette oasis a lieu un festival auquel j’ai été invitée à participer, avec d’autres artistes contemporains. Cette expérience m’a permis de re-questionner l’inscription de l’art dans des lieux autres, en dehors de circuits institutionnels. C’est avant tout une question d’engagement et de sincérité par rapport aux conditions de travail. Cela touche directement à la problématique des espaces alternatifs et aux modalités de faire qui sont encore à imaginer ici, en France. Je ressens le besoin de voir concrètement comment l’acte artistique rencontre les réalités d’un lieu, son environnement. C’est une question des pratiques au quotidien.

J’ai proposé comme action, pendant ce festival, de donner des cours à des enfants. Safa, la personne en charge des enfants de l’oasis, était elle-même dans le désir de la rencontre. Elle a tout accepté de moi en bloc, et moi, j’ai tout accepté d’eux en bloc. Cette expérience a été très puissante : deux blocs qui se rencontrent, deux pauvretés qui se rencontrent, sans intermédiaire, sans limites. C’est une question de générosité, d’hospitalité, d’accueil et d’ouverture à l’autre. Faire avec ce qu’on a sous la main, avec de la terre, des enfants qui crient, qui ont des voix magnifiques. Je cherche ce genre d’énergie pour le CCN en terre et paille.

J’ai ressenti physiquement ce besoin d’être proche de gens qui n’ont presque rien. Au-delà de l’acte artistique, j’en ai besoin en tant que personne, peut-être pour recommencer un cycle, pour retrouver une nouvelle énergie, questionner à nouveau le soi et interroger un état de fait ici en France, cette rengaine qu’on répète à souhait : « Il y a beaucoup moins d’argent qu’avant ! » Cette phrase me donne envie d’aller vers la terre, là où il n’y a plus rien, où on vit dans un espace dépouillé. Retrouver l’essence ! Peut-être qu’aux sources du CCN en terre et paille il n’y a ni art, ni pédagogie, mais un désir intime de mon corps. Comme pour le premier épisode de Pour une thèse vivante, j’ai eu besoin de partager le plateau avec un âne. Je l’ai amené sur scène ! Son énergie m’était très importante artistiquement parlant, elle incarnait cette obstination qui crie « Je me débrouille ! » Aux origines de la dynamique de Pour une thèse vivante, il y a ce corps qui se déplace, suivant différents cycles. L’expérience du Maroc me permet de me dégager d’une manière de faire. Je cherche les écarts. J’ai besoin de me déplacer.

SMARANDA OLCÈSE — Quelles ouvertures cet écart permet-il d’envisager ?

CLAUDIA TRIOZZI — Il s’agit avant tout de faire fructifier cette dialectique extérieur/intérieur, ici/ailleurs, de faire autrement que les musées, les centres d’art, les théâtres. Quand on parle de création, on ne peut pas ne pas parler de l’espace, de sa propre vision de ce que c’est que bâtir un spectacle tout comme bâtir un lieu, on ne peut pas faire l’économie des questions : avec qui et comment ? Cela remet en jeu mon expérience, la renouvelle. Le sens de la création est le déplacement. J’ai besoin de cet écart. J’ai toujours aimé être en deçà ou au delà, même dans mes œuvres. Être en marge de quelque chose. Résister ! J’ai besoin, maintenant, que ce type de déplacement existentiel ne soit pas donné à voir seulement dans mes pièces, mais qu’il devienne aussi une expérience de vie et d’action artistique. Le CCN en terre et paille sera un lieu où j’organiserai mes écarts. Je vais provoquer des écarts très visibles, faire entendre que ma façon de créer est celle-là et que je peux la donner à voir même sans ma présence, en tant qu’action pédagogique. Très peu de gens ont compris l’endroit où je suis vraiment. Cela doit être entendu, pour pouvoir se transmettre. Nous ne sommes pas immortels. Pourquoi attendre ?
Je voudrais un lieu pour pouvoir également ouvrir ma curiosité à l’autre, être à la recherche d’une matière qui pourrait faire du sens pour moi, et cette matière ne se trouve pas que sur la scène.

SMARANDA OLCÈSE — Parlons de cet autre type de créativité. Le terme assemblage revenait souvent pour spécifier l’une des modalités de différents épisodes de Pour une thèse vivante. Attardons-nous un instant sur ces assemblages qui font du sens dans ces nouvelles expériences.
 

CLAUDIA TRIOZZI — Quand on est dans une quête, on voit. C’est l’essence de la création : je suis en quête, je tente de voir et je vois. Au Maroc, j’ai rencontré des personnes qui excellent dans l’art vernaculaire d’assembler des objets. On pourrait même dégager de leurs actes une pensée philosophique, une vision du monde. Par exemple, cette photo : un vieux monsieur, dans une médina, vend ses outils de fin de chantier et il les assemble d’une certaine façon – c’est précis, ça a trait à l’équilibre des objets entre eux, aux directions dans l’espace, à un savoir-faire proche de celui qui est lié à l’exposition d’objets d’art. Cette photo est aussi un résumé de fin de chantier, fait signe vers tout un processus qui l’a précédée : la construction, le devenir du chantier, désormais achevé, ces outils usés, presque rien, tout est amené au terme, épuisé. Il s’agit de pousser l’objet jusqu’à sa disparition, dans un certain sens. Peut-être est-ce même la fin d’une vie de travail.
Prenons cette autre photo  : faire d’un lit à une place un lit à deux places, souder la ferraille pour que la structure puisse accueillir un matelas double. Il y a des tas d’histoires qui se mêlent à cet objet. Ces processus artisanaux mobilisent autant l’imaginaire que l’art du fer et de la soudure. Il y a beaucoup d’humour, aussi ! Cet objet incongru devient un lieu d’écriture, un embrayeur de fictions.

SMARANDA OLCÈSE — Qu’est-ce qui vous intéresse, dans ces gestes : une proximité avec les matières, avec les objets, une disposition imaginaire ?

CLAUDIA TRIOZZI — C’est surtout cette proximité entre le penser et le faire qui me passionne. C’est un acte artistique, cela implique un processus et marque un écart envers des habitudes consuméristes. Il y a beaucoup d’inventivité, de poésie à l’œuvre, dans la construction de cet objet quotidien. Je suis touchée par cette capacité particulière de se connecter à l’objet. Cela me ramène à la façon dont j’envisage mes pièces, à cette fragilité toujours à l’œuvre dans ma manière de performer, d’aller dans les limites. Cela rejoint le dépassement des compétences. Ce vieux monsieur passe inconsciemment dans le domaine artistique, son geste fait écho à des courants de l’histoire de l’art, entretient une parenté avec les surréalistes ou les créateurs d’art brut. Le Maroc, de par sa situation socio-économique, est encore riche de ces savoir-faire, et je ne le dis pas avec une nuance de nostalgie ou sous l’emprise d’un quelconque d’exotisme.

SMARANDA OLCÈSE — Pour revenir à Un CCN en terre et paille, quelle sera sa relation avec le régime de la représentation que les autres épisodes de Pour une thèse vivante bousculent déjà, chacun à leur manière ?

CLAUDIA TRIOZZI — La construction du CCN en terre et paille sera filmée. Il est important de documenter les différentes étapes de la progression, en commençant par la maquette. Le défi de la thèse, cette fois, sera de construire le CCN, un manifeste concret dans l’espace public. À l’intérieur de ce bâtiment, j’inviterai un artiste, un point c’est tout. Une personne qui fait sens pour moi, qui fait masse. Un invité pour un lieu. Dans la ville, sur un terrain vague, dans les interstices.

SMARANDA OLCÈSE — Quelle signification prend ce geste de déplacement radical, dans votre parcours ?

CLAUDIA TRIOZZI — C’est un passage. C’est un geste qui fait signe dans le réel, qui s’inscrit dans une temporalité autre, un chantier qu’il faudra documenter. Nous allons peut-être inviter des spectateurs à prendre part ou à assister à différentes étapes de la construction, aux côtés des danseurs et des artistes. Cet épisode de Pour une thèse vivante va épouser cette temporalité longue ; et puis le travail physique peut aussi être spectaculaire – on pourra convoquer un public. Ouvrir le chantier à des invitations. La problématique de la survie sera présente tout au long du processus. Depuis le début, j’avais ce désir de travailler sur une forme qui évoque la menace imminente, la nécessité, l’urgence. Cela posera en acte la question : qu’est ce que survivre à soi ? Il y a aussi un aspect symbolique et parodique qui permet de tisser une foule de liens. Et il y a l’acte d’hospitalité : ce lieu, je ne le construis pas pour moi.

En tant que manifeste, Un CCN en terre et paille témoigne d’une vision de l’art, de l’engagement, des usages du champ artistique. C’est aussi une provocation.

Encore une fois : évoquer, à ce stade, le projet est difficile. Je n’ai jamais parlé des pièces qui n’étaient pas encore là, cela n’existe pas pour moi, cela n’a aucun sens : ce sont des matières qui bougent, qui ont leur vie, qui tendent à se développer autrement que par les mots.





Claudia TRIOZZI

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Claudia TRIOZZI

Type d’artiste: 

Author

 

Claudia Triozzi commence ses études de danse classique et contemporaine en Italie et s’installe à Paris en 1985.

Parallèlement à son travail d’interprète (avec Odile Duboc, Georges Appaix, François Verret, Alain Buffard, Xavier Leroy et Xavier Boussiron), elle crée ses propres pièces dans lesquelles elle développe aussi bien la direction de la mise en scène que l’interprétation. Son travail de recherche et de réflexion se fonde sur une transmission où l’expérience du faire, du partage et l’engagement à l’autre fait preuve de pensée ouvrant des espaces de subjectivité et de remise en oeuvre du temps.

Elle produit des spectacles iconoclastes, des tableaux vivants, dont la danse ne sort jamais indemne car il s’agit toujours pour Claudia Triozzi de mettre à l’épreuve les présupposés du spectacle chorégraphique. L’espace de représentation, les modes d’interprétation propres au danseur et les notions mêmes de spectacle font l’objet d’une perpétuelle remise en question. De pièce en pièce, d’espaces d’exposition en scènes de théâtre, Claudia Triozzi repousse les limites du corps et les espaces de visibilité du danseur.

Depuis la pièce The Family Tree (2002), Claudia Triozzi, accompagnée sur scène par Xavier Boussiron, explore le travail de la voix en passant par des expériences qui l’engageront à l’écriture de textes et de chansons. Elle expérimente des sonorités au vocabulaire bruitiste et lyrique où la voix s’exprime par des paragraphes de temps puisés dans le cinéma, le théâtre et la radiophonie.
En mars 2011, invitée par le Musée de la Danse à Rennes, elle entame un nouveau projet intitulé Pour une thèse vivante, dans lequel elle livre sa réflexion sur l’écriture d’artiste.

Son travail se développe aussi bien sur scène qu’au travers de vidéos ou installations, exposées dans les musées ou des galeries. Elle présente ses spectacles sur la scène européenne ainsi qu’aux États-Unis, en Corée, au Japon où elle a bénéficié de la bourse AFAA, Villa Kujoyama, hors les murs, 2004. Elle développe une pédagogie liée à son propre travail en intervenant dans différentes écoles d’art en France et à l’étranger. En 2011, elle reçoit la bourse d’aide à la recherche et au patrimoine en danse mise en place par le CND (Pantin) et une bourse de recherche à l’Akademie Schloss Solitude à Stuttgart. Claudia Triozzi est artiste associée au Centre national de danse contemporaine d’Angers de 2011 à 2013 puis au CDN Théâtre de Gennevilliers

Presentation

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La Piscine






Myriam Lefkowitz reaches the end of its second year of residency during which she conducted a research on the emergence of new schemes of attention generated by the experience of immersive devices, designed for a spectator and performer.

The project Walks, Hands, Eyes (a city), developed since 2008, is also an experience for one viewer and a guide. During a silent walk of about an hour in the city it forges a special relationship between walking, seeing and touching. From the many walks engaged in several cities of the world (New York, Vilnius, Venice, Brno, Buenos Aires ...) an unprecedented form of existence of the city has emerged, beyond its usual functionality and customs.

How can one be sure in such darkness is a project developed at Les Laboratoires d'Aubervilliers. It is also for one spectator, this time based on the experience of a motionless body immersed in the dark, moved by manipulation and by the sound space created with and around him by a performer. Based on a principle of scarcity of sensory stimulation, this device emphasizes the fiction of the body and the space that takes shape from almost nothing.

While these two years have allowed her to develop and regularly activate the two devices described above, Myriam Lefkowitz concludes her residency with two important public forms.

On the one hand, the publication of Walk, Hands, Eyes (a city), co-edited by Les Laboratoires d'Aubervilliers and the Beaux-Arts de Paris. Via the texts of the artist and her guests, the book describes the geography, the issues and the nature that the perceptual experience of the walk, reconstructs. Indeed, interested in the considerable panel of images and accounts / stories produced by the experience of her blind circulation device in the city, Myriam Lefkowitz sewed with all the subtlety that characterizes her practice, a text from the collected testimonies of spectators and invited some to make updates on specific problematic.
With the contributions of Myriam Lefkowitz, Esther Salmona, Sophie Houdart, Yaël Kreplak, Clément Morier, Valentina Desideri, Valérie Pihet et Mathilde Villeneuve.

Moreover, the public opening of La Piscine, project matured during the two years of her residency, set and active practices in common to address a single viewer and infiltrate during six days in the Leclerc pool activities in Pantin. La Piscine can be seen as an important step in the research of Myriam Lefkowitz, concerning the opening to new schemes of attention but also in her desire to co-construct this work in relation with artists who share her concerns and questions.
With Myriam Lefkowitz, Valentina Desideri, Jean-Philippe Derail, Ben Evans, Alkis Hadjiandreou, Julie Laporte et Géraldine Longueville Geffriaud.








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Unrealized project bathhouse at the corner of Victor Hugo and Florian street in Pantin. 1890   © archives municipales de Pantin









With the support of Est Ensemble, the FNAGP
and the Département de la Seine-Saint-Denis

 



Mots-clés: 

  • performance
  • peceptive experience

Séminaire Pratiques de soin et collectifs - Rencontre #5

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23. Février 2017 - 19:00» 22:30
Jeudi 23 février 2017, 19h




Néo-chamanisme.


Après avoir évoqué l'année dernière les pratiques collectives des entendeurs de voix avec REV (réseau sur l'entente de voix), et à la suite de notre dernière rencontre autour de l'institution psychiatrique et d'expérimentations pour en rendre poreuse ses frontières, nous allons nous pencher avec David Dupuis sur les implications d'une expérience de soin convoquant les univers chamaniques des régions amazoniennes du Pérou.

Là encore il sera question de frontières, entre les pratiques traditionnelles chamaniques (avec la difficulté de définir ce qu'est la "tradition" dans des mondes sociaux et écologiques ravagés par la mondialisation économique) et des formes éclectiques accusées d'appartenir aux courants disparates du New Age, visant des nouvelles économies du « développement personnel ». Mais encore, entre les formes dominantes de soin occidental qui individualisent les corps et les esprits, les ramenant à eux-mêmes (de la psychiatrie biologique aux thérapeutiques « psychodynamiques »), et de nouvelles « niches écologiques » d'où émergent  des nouveaux univers relationnels, des pratiques de soin qui convoquent des êtres non-humains
« dans le vide laissé par l'absence des Dieux » (Michel Foucault, Naissance de la clinique).

On pourra dire de ces formes de soin syncrétiques qu'elles exigent une forme de conversion, celle-ci passant alors par l'initiation ad hoc qui prétend nous relier à des univers comprenant des invisibles.

Conversion, voilà le mot à bannir dans nos univers commandés par les psychothérapies laïques. Mais au fond, comme l'affirme Mikkel Borch-Jacobsen (La fabrique des folies), toute thérapeutique n'implique-t-elle pas un processus de conversion, le passage d'un monde à un autre, la reconstitution active entre le soignant et le patient d'un nouveau monde pour faire exister autrement des expériences singulières de souffrance ?

La question qu'on pourrait poser alors est la suivante : la guérison ne suppose-t-elle pas la ré-affiliation d'une personne en souffrance à de nouveaux univers de référence, exigeant des pratiques de médiation singulières et la constitution d'un nouvel éthos théorique auxquels adhèrent de nouveaux collectifs, aussi bien composés de soignants que de
« soignés » ?  Ce qui nous importe dans ce cas, ce sont les rapports qui se tissent entre une multiplicité de mondes. Et on voit mal comment ils pourraient s'extraire des conflits entre les mondes.



David Dupuis est anthropologue. Il vient de soutenir une thèse, sous la direction de Philippe Descola, résultat de ses recherches sur des expériences de soin s'appuyant sur des traditions chamaniques des indiens d'Amérique du Sud. Il a séjourné longtemps au Pérou, dans un lieu de soin appelé Takiwasi où il a participé à la vie de cette communauté thérapeutique.

 

Labo des Labos

Atelier de lecture "Extra Sensory Perception" #8

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19. Janvier 2017 - 16:00» 18:00
Jeudi 19 janvier 2017, à 16h

Les Laboratoires d’Aubervilliers poursuivent les ateliers de lecture qui, tous les quinze jours, proposent de mener collectivement recherches et réflexions autour d’une problématique spécifique abordée depuis différentes disciplines (l’art, les sciences humaines, la politique). Ces ateliers participent à la construction du « Printemps des Laboratoires », programmation qui se décline tout au long de l’année via des workshops, tables rondes, projections jusqu’à l’avènement d’un moment public intense. Ce rendez-vous public, qui aura lieu en juin 2017, en constitue la mise en perspective finale à une échelle internationale. Cette programmation est articulée chaque année autour d’une notion spécifique ; cette année il s’agit de « Extra Sensory Perception ».

La quatrième édition du Printemps des Laboratoires a ouvert un champ très vaste que nous souhaitons continuer à explorer pour cette nouvelle saison. Sous l’intitulé « ESP (Extra Sensorial Perception) », nous proposons de poursuivre nos réflexions.

Il sera question de comment faire de la place dans nos vies à des voix multiples et contradictoires, à un “Je” non unique, centre de gravité narratif, à des entités non-humaines et autres mondes invisibles, de comment en être remplis sans être assaillis. On se demandera ce que peut être une mystique contemporaine et dans quelle histoire hallucinée, illuminée, visionnaire nous souhaitons nous situer aujourd’hui. On cherchera les méthodes de désindividualisation afin de partager ces visions et de les rendre collectives et habitables.



Atelier # 8

Pour ce huitième atelier de lecture dans le cadre du Printemps des Laboratoires et de l’exploration des perceptions extra sensorielles, nous invitons la réalisatrice et scénariste Yolande Zauberman et la photographe et écrivain Paulina Spiechowicz, co-créatrices du livre Les mots qui nous manquent, paru à l’automne 2016. A travers cette exploration des mots qui manquent à nos langues mais existent dans d’autres, nous faisons l’expérience de l’invisibilité et de la visibilité du langage. Si certains mots existent dans certaines langues pour désigner des perceptions et des émotions, ces perceptions et sensations sont-elles orphelines dès lors que les mots pour les désigner n’existent pas dans notre langue ? Que deviennent-elles alors ? L’invisibilité dans lesquelles ces langues se retrouvent assignées constitue-t-il un autre régime de relation qui s'impose à nous, hors de tout langage ?

« L'idée de ce livre m'est venue en regardant les Indiens monter le long des façades pour nettoyer les vitres des gratte-ciels à New York. Leur tribu ignore le mot « vertige », il manque à leur langue, sa sensation, le concept même. Certains mots sont comme la pomme qu’Eve a offert à Adam, dangereux à connaître. D'autres ouvrent les coeurs. Qu'ils expriment le paradis ou le cauchemar, grâce à eux, on n’est plus tout à fait un étranger. On traverse les frontières de l’intime. Dans l'argot de Rome, « Paccare» c'est s'embrasser passionnément en se touchant, ou voler des bagages dans une voiture sans surveillance. « Twerk », à la Jamaïque, évoque une danse de filles très sensuelle qui incite au sexe. En arabe, « Wiswas » désigne une voix, une obsession qui tourne dans nos têtes et n’en veut plus sortir. Quand on prononce ces deux syllabes en Orient, les regards s’éclairent, les sourires jaillissent. Ces secrets collectifs composés d’un seul mot désignent des sentiments ou des sensations dont on ne savait même pas qu’ils pouvaient être nommés. Ces mots manquants nous grandissent. Ils nous racontent des histoires de tous les jours, des histoires de fête, d'amour ou d'esclavage. Ils repoussent les limites de notre monde et de notre langage. On sent soudain ce que sentent les autres. » - Yolande Zauberman


Yolande Zauberman
, née à Paris, est scénariste et réalisatrice de films documentaires et de fiction. Elle aborde le cinéma en travaillant aux côtés d'Amos Gitaï et réalise en 1987 un premier documentaire sur l’apartheid en Afrique du Sud, Classified People qui remporte entre autres le Grand Prix du Festival de Paris et le Bronze Rosa au Festival de Bergame (Italie). Le second, Caste Criminelle (1989), est tourné en Inde, et est sélectionné au Festival de Cannes. Trois ans plus tard, elle signe son premier long métrage de fiction, Moi Ivan, toi Abraham. S’ensuivent les deux films Clubbed to Death (Lola) (1996) et La guerre à Paris (2001). Elle signe également l’idée originale des films Tanguy (2001) et Agathe Cléry (2008) pour le réalisateur Étienne Chatiliez et réalise des séries de photos pour le magazine Spoon et le mensuel Le Monde diplomatique. Elle réalise en 2004 la comédie expérimentale Paradise now - Journal d'une femme en crise et retourne au documentaire avec Un juif à la mer tout en poursuivant ses recherches sur l’image avec la création de CATMASK, une caméra sur un masque de chat, qui la conduit à travailler avec des artistes et des danseurs. Depuis quelques années, elle filme avec Stephen Torton, Too Soft For Anybody I Know sur Jean-Michel Basquiat.
En 2012, Yolande Zauberman poursuit la réalisation de l’œuvre Oh, Je vous veux !, film-installation à la croisée du cinéma et de l’art contemporain et se consacre à la réalisation de son prochain film, L'Amant palestinien.


Labo des Labos

Seminar / Care Practices and collectives / Season #2

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Seminar Care Practices and collectives
Season Two.


                                           But how a new mythology is itself to
                                           arise, which shall be the creation, not of
                                           some individual author, but of a new
                                           race, personifying, as it were, one single
                                           poet — that is a problem whose solution
                                           can be looked for only in the future
                                           destinies of the world, and in the course
                                           of history to come
.

                                           Friedrich Wilhelm Schelling,
                                           The Modern Construction of Myth
                            

   


It is important we locate the issue of care within a political landscape — a landscape we could describe as a crisis, for it is imposed on us. And we could join others in saying that “crisis” is nothing other than a mode of governing. Governing through fear, through a subjective putting into tension, through the determination of constantly destabilised social identities — these are the new forms of governance.
The imperious injunction to adapt to instability seems to be the mode of subjectification fostered by governing institutions, on a countrywide level, with the institutionalisation of precarity or emergency laws that reveal the police State in its full glory. And also on the individual level, in the way life becomes an anxious task of prospecting. In such a framework, the only grounds for community is the shared experience of fear and insecurity.   

Yet we also know that the word “crisis” is etymologically linked to the idea of decision-making. Let’s say the “crisis” we are experiencing announces new, unexpected directions, that is, new paths for emancipation. And we are, indeed, a growing number who want just this and who are acting in consequence, be it by occupying city squares, by “flooding” the streets to protest, or by experimenting with new forms of cooperation, or all of these actions at once.

There is no longer any doubt that the very illegitimacy of those who claim to govern us and their institutions radically increases the possibility of cultivating the arts as a means of opposing governance. We can oppose the logic of integration (be it by market institutions — the institution of the salary and the demented production of value that destroys the plurality of our living environments — or by state institutions that construct standardised life-paths and identities) through the fragmentation of new forms of “communality”. We can oppose the management of the population as an administered totality through the construction of singular communities. We can oppose the delegating of our instituted needs by a microphysics of power through attentiveness towards the singularisation of our collective life.   

It thus becomes clear that care is located at the borders of politics — borders which care and attentiveness can render porous. We must pay attention to all the processes of individuation that enable us to situate the ways the collective can be established and, by locating them, to cut paths between worlds. In this perspective, care is to be apprehended as the making of differences from which processes of singularisation emerge, averting attempts towards an ontological unification.   

If we embrace the hypothesis whereby politics emerges with the process of deserting identities shaped by a police state and which enable the administration of a particular social order, this also means the emergence of new regimes of sensibility and collective enunciation opens up the possibility for alternative forms of community. We no longer want a universal Subject, even if presented as the subject of emancipation: we know the disastrous implications of establishing a political subject that subsumes all other plural forms of subjectivation.    

The misery of an already established universalism, leading to a pitiful inattentiveness towards the environments in which we co-exist. Caring and healing are processes that establish difference. Forms of trans-individuality give rise to new modes of experience. In this way, an ecology of care entails experimenting and experiencing relations with others and with the others of others, i.e., weaving relations. We must repopulate the world with the infinite diversity of human relationships. Taking care is about supporting heterogeneous forms of co-individuation.    

What we are concerned with is thus neither “the tragic subject of the lack-of-being”, nor self-care inflated by an ideal of health, nor the hyper competent individual, switched on and frenetically active in adapting to the economic world. What we are concerned with are the apparatuses for experimenting relationships between beings, both human and non-human, which construct new worlds or which invent ways of inheriting worlds that came before. It is not “individuals” or “subjects” that are cared for but the relationships we pertain to. In this perspective, there is no subject that precedes the established relationship, no possible neutrality, no “modest witness” of the world’s objectivity, to use Donna Haraway’s terms, but a common engagement in emancipatory processes which are simultaneously the singularisation of our relationships and a collective project to situate these relationships: creating sites.

This will be our guiding intention for this second cycle of discussions on care and collective practices. Creating or maintaining plural collective constitutions and sharing experiences also involves a fragile and risky exercise in de-allocating already standardised identities (those maintained by a certain form of medicine, psychiatry, psychoanalysis, sociology or the legal system). If we are rejecting governmental pastoralism, or the pedagogical claim of a few to dictate to others what the right form of emancipation might be, it is because care produces difference.
   

Following an introductory session that I will be facilitating along with Thierry Drumm, a pragmatist philosopher and attentive reader of William James, in the company of other guest speakers we will be exploring: neo-shamanic practices; the introduction of Candomblé in France; the establishment of an autonomous social/community care centre in the Greater Paris region; practices of mutual aid groups at the margins of the psychiatric institution; the implementation of self-support groups for persons affected by somatic illnesses; care work among sex workers in a working-class area of Paris; and our relationship to the flora that grows in our urban environment…This will enable us to begin to map the plural practices of care and attentiveness as different forms of emancipation.
   

These discussions are scheduled on the last Thursday of the month at Les Laboratoires d’Aubervilliers, from 7 pm.

The dates are as follows (the content of each session will be announced in due course): Thursday 27 October, 24 November, 15 December 2016, and Thursday 26 January, 23 February, 30 March, 27 April and 25 May 2017.

 




Séminaire / Pratiques de soin et collectifs / saison #2 / Josep Rafanell i Orra

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Séminaire Pratiques de soin et collectifs
Sur une proposition de Josep Rafanell i Orra

Deuxième saison



                                           Mon bon ami, lui dis-je, aussi vrai que je
                                           suis moi et que vous êtes vous –
                                           Qui êtes-vous donc ? me dit-il.
                                           Pas de question embarrassante,
                                           répondis-je
.

                                           Laurence Sterne,
                                           Vie et opinions de Tristram Shandy
                            

   


Il me semble important de situer à nouveau la question du soin dans un paysage politique. Et ce paysage, on pourra l'appeler la crise qui nous est imposée. Et nous dirons avec d'autres que « la crise » n’est rien d’autre qu’un nouveau mode de gouvernement. Gouverner par la peur, par la mise en tension subjective, par la détermination d’identités sociales qui ne cessent en même temps d’être déstabilisées. L’impérieuse injonction à s’adapter à l’instable semble être devenu le mode de subjectivation promu par les institutions de gouvernance, à l’échelle de pays entiers, avec l'institutionnalisation de la précarité ou avec des lois d'urgence dévoilant le fondement policier de l'Etat. Ou encore à l’échelle des conduites individuelles, en faisant de la vie un travail anxieux de prospection. Voici que la seule communauté possible ne saurait-être que celle de l’expérience commune de la peur et de l’insécurité.   

Et pourtant nous savons que le mot crise est lié aussi, étymologiquement, au sens de prise de décision. Disons que la « crise » que nous vivons annonce des bifurcations inattendues comme autant de nouvelles voies d’émancipation. Et que nous sommes, à nouveau, de plus en plus nombreux à le vouloir ainsi et à agir en conséquence : que l’on occupe des places, que l’on "déborde" dans les rues ou que l’on expérimente des formes de coopération. Ou tout à la fois.

Il n’est plus possible d’en douter, l'illégitimité de ceux qui prétendent nous gouverner, et de leurs institutions, augmente radicalement la possibilité de cultiver des arts pour ne plus être gouvernés. A la logique intégrative (que ce soit par les institutions du marché –le salaire et la folle production de valeur qui détruit la pluralité de nos milieux de vie–, ou que ce soit par les institutions étatiques qui fabriquent des parcours et des identités normées, au demeurant introuvables), nous pouvons opposer la fragmentation de ce que l'on peut appeler avec d’autres de nouvelles formes  de « communalité ». A la gestion de la population comme une totalité administrée on pourra opposer des fabriques de communautés singulières. A la délégation de nos besoins institués par toute une microphysique du pouvoir, on peut opposer l’attention vers la singularisation de notre vie commune.   

On peut dire alors que le soin se situe au bord de la politique. Ce sont le soin et l’attention qui permettront que les frontières de la politique deviennent poreuses. Il s’agit alors de porter notre l’attention aux processus d’individuation qui permettent de situer les formes d'instauration du collectif et, en les situant, de frayer des passages entre des mondes.  Le soin est en ce sens la fabrique des différences d’où émergent des singularités conjurant les tentatives d’une unification ontologique.   

Si nous adoptons l’hypothèse que la politique surgit là où se produit un processus de désertion des identités policières qui rendent possible l’administration d'un certain ordre social, cela veut dire aussi que l’apparition de nouveaux régimes de sensibilité et d’énonciation collective amorcent la possibilité d'autres formes de communauté. Nous ne voulons plus d’un Sujet universel, serait-il le sujet de l’émancipation : nous savons le désastre auquel aura conduit l’instauration d’un sujet politique subsumant tous les autres formes plurielles de subjectivation.    

Misère de l’universalisme déjà fondé, conduisant à la désolante inattention au regard des milieux de nos coexistences. Soigner, guérir, ce sont des processus instituant la différence. C’est par des formes transindividuelles qu’émergent des nouveaux modes d’existence de l’expérience. Alors, une écologie du soin suppose l’expérimentation de relations avec les autres et les autres des autres : un tissage de relations. Il faut repeupler le monde de la variété infinie des relations entre les êtres. Prendre soin, c’est accompagner des formes hétérogènes de co-individuation.    

Ce qui nous intéresse donc, ce n’est ni "le tragique sujet du manque-à-être", ni le souci de soi boursoufflé par un idéal de santé, ni non plus l’individu hyper-compétent, frénétiquement "activé" dans l'adaptation au monde de l'économie. Ce qui nous importe ce sont les dispositifs d’expérimentation de rapports entre les êtres, humains et non-humains, qui fabriquent des nouveaux mondes ou qui inventent les manières d’hériter des mondes anciens. On ne soigne pas des « individus » ni des  « sujets » mais on prend soin des relations auxquelles nous appartenons. Ici, pas de sujet précédant la relation instaurée, pas de neutralité possible, pas de « témoin modeste » de l’objectivité du monde, selon les mots de Donna Haraway, mais un engagement commun dans des processus d’émancipation qui sont, simultanément, la singularisation de nos relations et un travail  collectif pour situer ces relations: l'instauration de lieux

Voici la tentative qui guidera le cycle de rencontres que nous proposerons lors de cette deuxième saison du séminaire autour du soin et des pratiques collectives. Faire exister des constitutions collectives plurielles, le partage de nos expériences, suppose aussi un exercice fragile et risqué de désassignation aux identités déjà normées (celles purement fantasmatique de certaines formes de médecine, de psychiatrie, de psychanalyse, de sociologie ou de la justice). S'il s’agit de refuser le pastoralisme gouvernemental, ou la prétention pédagogique de quelques uns à dicter aux autres les manières de la bonne émancipation, c'est que le soin est une fabrique de la différence.
   

Après une séance d'introduction que je partagerai avec Thierry Drumm, philosophe pragmatiste, lecteur attentif de W. James, nous nous pencherons avec d'autres invités sur des pratiques néo-chamaniques, sur l'introduction du candomblé en France, sur la réinvention d'une friche dans la banlieue parisienne, sur les pratiques des groupes d'entraide mutuelle à la bordure de l'institution psychiatrique, sur la mise en place de groupes d'auto-support de personnes atteintes d'une maladie somatique, sur la mise en place d'un centre social autonome, sur nos rapports aux plantes qui habitent nos milieux urbains, sur l'usage d'une ambulance achetée collectivement... Cela devrait nous permettre de commencer à dessiner une sorte de cartographie de pratiques plurielles de soin et d'attention comme autant de formes d'émancipation.
   
Ces rencontres auront lieu comme d'habitude les derniers jeudis du mois aux Laboratoires d'Aubervilliers, à partir de 19h.

Les dates prévues, dont nous annoncerons le contenu ultérieurement, sont les suivantes: les jeudis 27 octobre, 24 novembre, 15 décembre 2016, puis les jeudis 26 janvier, 23 février, 30 mars, 27 avril et 25 mai 2017.

 

Jeudi 27 octobre 2016
« Pragmatisme et mondes en train de se faire »  -  Présentation du cycle des rencontres Pratiques de soin et collectifs avec Thierry Drumm, philosophe pragmatiste.

Jeudi 24 Novembre 2016
« Cohabiter avec les plantes dans la ville »  -  Avec Véronique Désanlis, botaniste, et Ariane Leblanc coordinatrice du projet La semeuse.

Jeudi 15 décembre 2016
« Les électrosensibles »  -  Avec Nicolas Prignot, chercheur et philosophe.

Jeudi 26 janvier 2016
« La psychiatrie. Bordures »  -  Avec Alexandre Vaillant, animateur du GEM (groupe d'entraide mutuelle) à Saint Denis, Charles Burquel et Mounia Ahammad, psychiatre et infirmière dans plusieurs institutions et espaces collectifs bruxellois.

Jeudi 23 février 2016
« Néo-chamanisme et communauté »  -  Avec David Dupuis, chercheur sur des pratiques de soin chamaniques en Amérique latine.

Jeudi 30 mars 2016 
« Une expérience d'entraide autour de la maladie d'Huntington »  -  Avec Alice Rivière, écrivaine, cofondatrice de Ding Ding Dong.

Jeudi 27 avril 2016
« Friches: une expérience communale »  -  Avec Olivier Pousset, documentaliste et habitant d'Aubervilliers.

Jeudi 18 mai 2016
« Ne tirez pas sur l'ambulance. L'invention de pratiques de soin en milieu hostile »  -  Membres de l'Association de soin intercommunal, Plateau de mille vaches et Rouen.


Présentation

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Revue N/Z

 






A l'occasion du déploiement du second numéro de la revue N/Z sur l'année 2016/2017, Les Laboratoires d'Aubervilliers sont heureux d'accueillir à nouveau la revue et deux chefs de rubrique pour deux soirées de rencontres publiques.


La revue N/Z s’intéresse à l’écriture, comme pratique de travail, en amont de sa formalisation définitive. Elle observe les processus de création des auteurs et des artistes à travers l’écriture.

Laboratoire de création, elle organise des rencontres publiques sous forme de rubriques une fois par mois, anime un site internet sur la durée de son édition et publie un volume papier à l’issue de l’édition. Chaque édition dure 10 mois. Chaque rubrique est dirigée par un auteur ou un artiste.

Ces chefs de rubrique, qui changent à chaque numéro, invitent à leur tour des intervenants et renouvellent les formes de la rencontre en public. Elle a pour but de toucher un public large, de sensibiliser, de faire découvrir les écritures artistiques contemporaines. Ses activités se déroulent dans divers lieux parisiens et franciliens.

 
Aux Laboratoires d'Aubervilliers en 2016 ce seront

Alban Lefranc pour une première soirée publique
intitulée Etat d'Urgence, Jouissance d'Etat
le vendredi 23 septembre 2016 à 20h

et

Agnès Geoffray pour une seconde soirée
intitulée Suspens & Syncope
le vendredi 27 janvier 2017 à 20h30

 


Revue N/Z #2

 

 


La revue N/Z reçoit le soutien du Goethe Institut


Suspens & Syncope

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27. Janvier 2017 - 20:30» 22:00
Vendredi 27 janvier 2017, 20h30

 

 Suspendue - Photographie, 2016 - © Agnès Geoffray


À l’initiative de la revue N/Z, et accueilli aux Laboratoires d'Aubervilliers, cet événement performé sera l'occasion de partager et rendre visible les multiples échanges engagés depuis longtemps entre Agnès Geoffray, artiste et Vanessa Desclaux, commissaire.

Convulsionnaires, hypnose, pâmoison, lévitation, évanouissement et syncope, nous accompagneront tout au long de la soirée. Du partage d'images aux échanges littéraires, des gravures, des photographies, aux lectures et aux récits, tous seront mis en scène pour révéler la part affabulatoire de ces états de suspension.
 

Une pièce conçue par Agnès Geoffray, à la croisée du performatif et du photographique, clôturera la soirée, et revisitera ces multiples postures entre chute et élévation, effondrement et ascension.

Avec les performeurs : Mordjane Mira et Selwan Cherfi.

 

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« Depuis longtemps des corps pendus, suspendus, des gestes arrêtés, des paroles figées hantent mon travail de photographie et d’écriture. Ces figures reviennent inlassablement au gré de mes travaux. Je joue de ces arrêts et ces états de suspensions, entre la chute et l’ascension, entre l’effondrement et l’élévation. Ce qui est fascinant dans le suspens c’est le temps manquant. On ne sait rien du temps précédent, on devine tout juste le temps suivant, un mouvement suspendu où tout est encore possible. Un temps de résistance. L’étirement du temps, cette attente figée est une résistance face au drame à venir.

Au fil des échanges avec Vanessa Desclaux, le suspens a glissé peu à peu vers la syncope. Cette rupture dans le réel, ce flottement temporel, cet arrêt est devenu éclipse. Défaillir doucement ou sombrer brutalement, pour se mettre en retrait du réel. »

A.G.

 

 

Schéma / Pensées échangées entre Vanessa Desclaux et Agnès Geoffray
© Agnès Geoffray / Vanessa Desclaux

 

ENTREE LIBRE SUR RESERVATION à
reservation@leslaboratoires.org ou au 01 53 56 15 90

 

 

 

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Née en 1973, à Saint-Chamond. Agnès Geoffray pratique l'écriture et la photographie. Elle a été en résidence à la Rijksakademie à Amsterdam et pensionnaire à la Villa Médicis, Académie de France à Rome. Ses travaux sont présentés actuellement à l'exposition Soulèvements, au Jeu de Paume à Paris, et Un Musée imaginé, au Centre Pompidou Metz. Elle a exposé notamment au Kunsthaus à Zurich, à la Kunsthalle Wien à Vienne, au Magasin à Grenoble, au Mac Val à Vitry-sur-Seine, au Centre de la Photographie à Genève, au Centre Photographique d’Ile-de-France à Pontault-Combault, au Frac Auvergne à Clermont-Ferrand. Ses travaux font partie des collections publiques du Fond National d’Art Contemporain à Paris, du Frac Auvergne à Clermont-Ferrand, du Mac Val à Vitry-sur-Seine, du Centre Pompidou Musée National d'Art Moderne à Paris et du Musée de l’Elysée à Lausanne. Trois ouvrages sur son travail ont été publiés aux éditions de la Lettre Volée à Bruxelles : Ultieme Hallucinatie, Profond silence et tout récemment Les Captives.
www.agnesgeoffray.com

Curatrice indépendante, critique d’art et enseignante à l'École Nationale Supérieure d'Art de Dijon, Vanessa Desclaux a récemment complété un doctorat en Curating à Goldsmiths, Université de Londres. Son projet de doctorat interroge les conditions au sein desquelles la pratique curatoriale et la figure du commissaire d'exposition opèrent et se transforment aujourd’hui. Ses projets récents incluent Se Prendre au jeu : rêves, répétitions et autres détours, au Frac Franche-Comté (2015), Une exposition qui bégaie, au CRAC Alsace (2014), et Anna Barham, Agnès Geoffray, Nathania Rubinà la galerie Jousse Entreprise dans le cadre du festival Nouvelles vagues du Palais de Tokyo (2013). En 2014, elle publie également un livre intitulé Matt Mullican Projections Landscapes, édité par If I Can’t Dance I Don’t Want To Be Part of Your Revolution à Amsterdam. Elle est actuellement curatrice associée à La Galerie, centre d’art de Noisy-le-Sec jusqu’en juillet 2017.

Aérialiste et scénographe du cirque, Selwan Cherfi travaille avec les arts du cirque dans différents univers (création, cirque, cabaret, parcs, tv, événementiel …), principalement au trapèze, à la corde lisse et au tissu. Auteur de plusieurs spectacles (dont le dernier  Passage) il adore travailler en duo et en équipe, découvrir de nouveaux univers et relever de nouveaux défis. Pour cette raison il a rejoint Agnès Geoffray et Mordjane Mira dans cette performance et pour une fois garder les pieds sur terre
www.selwancirque.com

Tout a commencé pour Mordjane Mira il  y a quelques années quand elle s'est inscrite dans une école de théâtre où elle a appris le chant, la danse, l'interprétation théâtrale, le travail du texte, de masque et d'improvisation ; tout en suivant en parallèle l'apprentissage de l'aérien et plus spécialement du trapèze fixe. Elle a continué à grandir grâce à de nouvelles disciplines telles que le grand ballant, le tissu aérien, la contorsion et l'acting. Ce qui lui a permis de participer à des projets en cabaret, en gala, pour des courts-métrages d'auteurs, un long métrage expérimental avec le Prix Nobel Gao Xingjian et pour des performances notamment Hentai Circus mis en scène par Karelle Prugnaud ou Passage de Selwan Cherfi.
www.mordjanemira.com/

 





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Remerciements à Stéphanie Jamet pour nous avoir initialement invitées à réfléchir à la notion de syncope.
Remerciements à Sally Bonn et Nathalie Lacroix pour nous avoir permis de concrétiser ce projet dans le cadre de la revue N/Z.


Standard

Suspens & Syncope

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oui
27. Janvier 2017 - 20:30» 22:00
Vendredi 27 janvier 2017, 20h30

 

 

 

This performed event, organised on the initiative of N/Z journal and hosted by Les Laboratoires d’Aubervilliers, will be an opportunity to share and give visibility to the many exchanges that have taken place over the years between artist Agnès Geoffray and curator Vanessa Desclaux.

Convulsion, hypnosis, fainting, levitation and syncope — these will be the leitmotivs of this evening event, which will involve literary exchanges, readings and accounts, and the sharing of images, etchings and photographs, to reveal the fantastical dimension of these states of suspension.
 

The evening will close with a piece by Agnès Geoffray, located at the crossroads between performance and photography, that will revisit these myriad positions somewhere between collapse and elevation.

With performers Mordjane Mira and Selwan Cherfi.

 

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“For a long time now, hanging, suspended bodies, halted gestures and frozen words have haunted both my photographic work and my writing. These figures just keep coming back. I play with these cessations and suspensions, situated somewhere between collapse and ascension. The fascinating thing about suspension is missing time. We know nothing about the time that precedes it and can barely make out the time that comes after — a suspended movement where everything is still possible. It is a time of resistance. This stretching-out of time, this frozen expectation is a resistance to the tragedy yet to come.

As my exchanges with Vanessa Desclaux developed, a gradual slippage from suspension to syncope ocurred. This break in reality, this floating of time, this cessation became an eclipse. A gentle decline or a brutal collapse in order to distance oneself from reality“.

A.G.

 

 

Schéma / Pensées échangées entre Vanessa Desclaux et Agnès Geoffray
© Agnès Geoffray / Vanessa Desclaux

 

 

FREE ENTRANCE ON RESERVATION at
reservation@leslaboratoires.org or by phone 01 53 56 15 90

 

 


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Agnès Geoffray is born in 1973 in Saint-Chamond, France. Her artistic practice involves writing and photography. She has been in residency at the Rijksakademie in Amsterdam and at Villa Medici, The French Academy in Rome. Her work is currently being shown in the exhibition Soulèvements at Le Jeu de Paume in Paris, and as part of Un Musée imaginé at the Centre Pompidou in Metz. Se has exhibited her work at the Kunsthaus in Zurich, the Kunsthalle Wien in Vienna, at Magasin in Grenoble, Mac Val in Virty-sur-Seine, the Centre de la Photographie in Geneva, the Centre Photographique d’Ile-de-France in Pontault-Combault, and the Frac Auvergne in Clermont-Ferrand. Her work has also been included in the public collection of the Fond National d’Art Contemporain in Paris, the Frac Auvergne in Clermont-Ferrand, the Mac Val in Vitry-sur-Seine, the Centre Pompidou Musée National d’Art Moderne in Paris and the Musée de L’Elysée in Lausanne. Three books on her work have been published by La Lettre Volée in Brussels: Ultieme Hallucinatie, Profond silence and, very recently, Les Captives.

Independent curator, art critic and lecturer at the Ecole Nationale Supérieure d’Art in Dijon, Vanessa Desclaux has recently completed a PhD in Curating at Goldmiths, University of London. Her doctoral project explores the conditions in which curatorial practice and the figure of the exhibition curator operate and shift in the contemporary context. Her recent projects include Se prendre au jeu : rêves, repetitions et autres detours, at the Frac Franche-Comté (2015), Une exposition qui bégaie, at the CRAC Alsace (2014), and Anna Barham, Agnès Geoffray, Nathania Rubin at galerie Jousse Entreprise as part of the Nouvelles vagues festival at the Palais de Tokyo, Paris (2013). In 2014 she also published a book titled Matt Mullican Projections Landscapes, with Amsterdam publisher If I Can’t Dance I Don’t Want To Be Part of Your Revolution. She is currently associate curator at La Galerie art centre in Noisy-le-Sec, until July 2017.


Arialist and circus scenographer, Selwan Cherfi works with the circus arts in various universes (creation, circus, cabaret, parks, tv, events ...), mainly trapeze, smooth rope and fabric. Author of several shows (including the last Passage) he loves to work in a duo or in a team, to discover new worlds and meet new challenges. For this reason he joined Agnes Geoffray and Mordjane Mira in this performance and for once he will keep his feet on the ground.  __  www.selwancirque.com

All started for Mordjane Mira a few years ago when she enrolled in a theater school where she learned singing, dance, theatrical performance, text work, mask and improvisation; while following in parallel the learning the aerial and more specifically the fixed trapeze. It continued to grow through new disciplines such as grand ballant, aerial fabric, contortion and acting. This allowed him to participate in projects in cabaret, gala, short author films, in an experimental feature film with the Nobel Prize winner Gao Xingjian and in performances like Hentai Circus staged by Karelle Prugnaud or Passage of Selwan Cherfi.  __  www.mordjanemira.com

 

 

Standard

Présentation

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Encyclopédie Pratique, collecte d’Aubervilliers

 
"Everyone has practices — be they intimate or collective, spiritual or physical, original or dull; invented practices, learned practices, pleasant or fastidious practices. Gradually, habits establish themselves as rituals — doing the washing up, going shopping, boxing, running, gardening, fixing one’s bike, prowling, collecting egg cups, posting videos, wandering about on construction sites, reading the back pages (faits d’hiver).
My own practice entails collecting practices. With the Encyclopédie Pratique de la Ville d’Aubervilliers, I hope to create an extensive corpus of body practices of the town inhabitants and regular visitors of Les Laboratoires d’Aubervilliers that will be published in book and serve as material for a choreographic piece".

Lenio Kaklea

 


 

For her residency at Les Laboratoires d’Aubervilliers beginning January 2017, Lenio Kaklea is proposing a project anchored in Les Laboratoires site itself and in the specific context of the town of Aubervilliers near Paris. She will be concerned with interrogating the social body by working on an Encyclopédie PratiqueA Practical Encyclopedia— and more specifically by collecting a set of physical practices connected to Aubervilliers, to its residents, and to regular visitors of Les Laboratoires d’Aubervilliers.

A Practical Encyclopedia is a site-specific project in progress the artist/choreographer has been working on since 2016. The project has a real anthropological dimension and draws more specifically on Marcel Mauss’s famous text Techniques of the Body, published in the original French in 1934. In the text, the French anthropologist suggests that utilitarian gestures are as diverse and multiple as languages:

        “I call technique an action which is effective and traditional (and you
         will see that in this it is no different from a magical, religious or
         symbolic action). It has to be effective and traditional. There is no
         technique and no transmission in the absence of tradition. This
         above all is what distinguishes man from the animals: the
         transmission of his techniques and very probably their oral
         transmission.”

         __ Marcel Mauss, Techniques of the Body, 1973 (1934) - [1].


Through her project, Lenio Kaklea hopes to begin an inquiry to better grasp and reveal the great diversity of movements in human culture, among other things through a catalogue of our bodily practices in human culture. She also hopes this research will be an opportunity to bring into relief the contemporary relationship to food, decoration, technology, love, sex, nature, spirituality, the economy, work, death, entertainment, (health)care, housekeeping, etc.

An initial version of the project was produced and presented as part of another artistic residency, À Domicile, in September 2016 in Guissény (a village in Brittany with a population of 1886). The project took shape as a collection of 48 practices. As part of her residency at Les Laboratoires, Lenio Kaklea intends to pursue this research and the attendant collecting work in the town of Aubervilliers, which has a much larger population, which will therefore enable her to establish a far greater collection. The artist’s objective is to gather between 300 and 800 portraits.

The work process will be organised into 3 stages. The first phase, which will involve gathering practices among the town’s inhabitants and regular visitors of Les Laboratoires, will entail wandering the area in order to seek out practices to be gathered. During the second phase, the responses collected will be used to put together brief texts/portraits — a writing-up phase that will be carried out by Lenio Kaklea, Lou Forster and Oscar Lozano. The texts will then be used as raw material for a choreographic piece which will be an exploration of this social bodyscape.

Finally, the research and collection project will lead to the publication of a text in several languages that will provide a sort of portrait of Aubervilliers, as well as the production of a choreographic piece — a solo work that will be performed by Lenio Kaklea and shown at Les Laboratoires d’Aubervilliers.

 

 

 

 

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Encyclopédie Pratique, collecte d'Aubervilliers is a project of Lenio Kaklea created in collaboration with :
Lou Forster (researcher curator)
Oscar Lozano (assistant of research)
Agnès Henry/extrapole (administrative care)
and Anne Becker/bureau PLATÔ (production and diffusion).

and supported by the Département de la Seine-Saint-Denis

 


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(1)  Les Techniques du corps is lecture done by Marcel Mauss, the 17th of May 1934 in the presence of the Société de Psychologie, and published for the first time by the Journal de Psychologie, vol. xxxii, no 3-4, 15th March-15th April 1935. Marcel Mauss studied the notion of the « technique du corps », and its difference between cultures.

 

Présentation

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Encyclopédie Pratique, collecte d’Aubervilliers


« Tout le monde a des pratiques. Des pratiques intimes ou collectives, spirituelles ou corporelles, originales ou banales; des pratiques inventées, des pratiques apprises, des pratiques plaisantes, des pratiques fastidieuses. Des habitudes se sont doucement constituées en rituels, faire la vaisselle, du shopping, de la boxe, courir, chasser, jardiner, entretenir son vélo, roder, collecter des coquetiers, poster des vidéos, se promener dans des chantiers, lire les faits d’hiver.
Ma pratique est de collecter des pratiques. Avec le projet de l’Encyclopédie Pratique de la Ville d’Aubervilliers, je souhaite créer un corps vaste de pratiques corporelles des habitants de la ville et des habitués des Laboratoires qui seront éditées dans un livre et serviront de matériaux à une pièce chorégraphique ».

Lenio Kaklea

 

 


Pour sa résidence aux Laboratoires d’Aubervilliers démarrant en janvier 2017, Lenio Kaklea propose un projet qui s’ancre sur le site et le contexte spécifique d’Aubervilliers. Il s’agira d’interroger l’idée de corps social via la création d’une Encyclopédie Pratique, et plus précisément d’une collection des pratiques corporelles liées à Aubervilliers et aux habitués des Laboratoires.

L’Encyclopédie Pratique (A Practical Encyclopedia) est un projet site-specific en cours conçu et développé par l’artiste et chorégraphe depuis 2016. Le projet recèle une réelle dimension anthropologique et prend plus spécifiquement sa source dans le célèbre texte de Marcel Mauss, Les Techniques du corps, publié en 1934. Au sein de ce texte, l’anthropologue français suggère que les gestes utilitaires sont aussi divers et multiples que les langues le sont :

   « J’appelle technique un acte traditionnel et efficace et il doit être à
      la fois traditionnel et efficace. Il n’y a pas de technique ou de
      transmission sans tradition. Voici comment les humains se différencient
      des animaux : par la transmission de leurs techniques et probablement
      par la dimension orale de leur transmission ».
      __ Marcel Mauss, Les Techniques du Corps (1), 1934.

A travers son enquête, Lenio Kaklea souhaite entamer un travail de recherche pour cerner et révéler l’immense diversité des mouvements dans la culture humaine, via notamment la réalisation d’un catalogue de ses pratiques corporelles. Elle souhaite également que cette enquête soit aussi l’occasion de révéler notre relation contemporaine à la nourriture, à l’ornement, à la technologie, à l’amour, au sexe, à la nature, à la spiritualité, à l’économie, au travail, à la mort, au divertissement, aux soins, à l’entretien ménager, etc.

Une première version de ce projet a été produit et présenté dans le cadre de la résidence artistique À Domicile en septembre 2016 à Guissény (village de 1.886 habitants situé en Bretagne). Le projet a pris la forme d’une collection de 48 pratiques. Dans le cadre de sa résidence aux Laboratoires, Lenio Kaklea souhaite poursuivre ce travail et la collecte qui l’accompagne dans la ville d’Aubervilliers, dont le nombre d’habitants est bien supérieur et permettra de constituer une collection plus importante. L’objectif que l’artiste se donne est de rassembler entre 300 et 800 portraits.

Le processus du travail s’organisera en trois temps. Le premier moment, celui de la collecte auprès des habitants et visiteurs, nécessitera l’arpentage du territoire pour aller à la rencontre des pratiques à collecter. Dans un second temps, les réponses recueillies feront l’objet de courts textes-portraits, temps d’écriture réalisé par Lenio Kaklea, Lou Forster et Oscar Lozano, et serviront de matière première pour la création d’une pièce chorégraphique qui se penchera sur ce paysage des corps sociaux. Enfin, l’ensemble de cette recherche et collecte aboutira à la publication de textes, en plusieurs langues, constituant une sorte de portrait d’Aubervilliers et la pièce chorégraphique, un solo porté par Lenio Kaklea, sera programmé aux Laboratoires.

 

 

 

 

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Encyclopédie Pratique, collecte d'Aubervilliers est un projet de Lenio Kaklea réalisé avec la collaboration de :
Lou Forster (chercheur curator)
Oscar Lozano (assistant de recherche)
Agnès Henry/extrapole (accompagnement en administration)
et Anne Becker/bureau PLATÔ (production et diffusion).

et a reçu le soutien du Département de la Seine-Saint-Denis.

 

 


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(1)  Les Techniques du corps est une conférence prononcée par Marcel Mauss, le 17 mai 1934 devant la Société de Psychologie, et publiée pour la première fois par le Journal de Psychologie, vol. xxxii, no 3-4, 15 mars-15 avril 1935. Marcel Mauss y étudie la notion de « technique du corps », et ses variations entre les cultures.

 


ESP (Extra Sensory Perception)

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Le Printemps des Laboratoires #5



Le Printemps des Laboratoires est un projet de recherche partagée formulée par Dora García, Alexandra Baudelot et Mathilde Villeneuve, codirectrices des Laboratoires d’Aubervilliers. Il s'agit d'une programmation qui se déploie toute l’année via des ateliers de lecture, des séminaires et des évènements publics (projections de films, tables rondes, performances, etc) relatifs à une problématique particulière, afférente à l’art mais débordant son cadre.

Ce projet construit tout au long de l’année un public “concerné” (chacun est invité à y prendre part, habitants d’Aubervilliers, étudiants, amateurs, experts) qui puisse échanger et mettre en partage ses points de vue et ses expériences. Il s’achève au printemps par un rendez-vous public offrant une mise en perspective finale à une échelle internationale.

Le Printemps des Laboratoires est une plateforme de travail collective qui privilégie les expériences de l’art et du politique à ses représentations, la circulation et la confrontation des idées à leurs formes de transmission autoritaire. Il est un endroit de développement transversal et critique des différents projets menés par les artistes des Laboratoires d’Aubervilliers. Il offre enfin la possibilité d’observer et de penser, depuis un contexte artistique, les questions sociales et politiques actuelles.

La première édition du Printemps des Laboratoires (2013), abordait sous l’intitulé « Commune, Commun, Communauté »,  la question des communs. La seconde édition (2014), « Ne travaillez jamais! », posait celle des relations qui unissent l’art et le travail, tandis que la troisième édition, « Performing Opposition » (2015) explorait l’art dans sa relation à la « polis » à contre courant des pouvoirs institués, la question de performer l’espace public y étant centrale. Pour sa quatrième édition (2016), « La Psychotropification de la société », il s'est agit d'explorer les phénomènes d'augmentation exponentielle de la médicamentation dans le cadre de traitement des troubles mentaux, pour notamment réfléchir aux effets de normalisation et de contrôle, et plus globalement explorer le rapport que la société entretient à la maladie et la folie.


Cette quatrième édition a ouvert un champ très vaste que nous souhaitons continuer à explorer pour cette nouvelle saison. Sous l’intitulé « ESP (Extra Sensory Perception) », nous proposons de poursuivre pour la cinquième édition du Printemps des Laboratoires nos réflexions via les ateliers de lecture quinzomadaires, le séminaire mensuel « Pratiques de soin et collectifs » ainsi que d’autres rencontres publiques qui s’échelonneront entre les mois d'octobre 2016 et de juin 2017.

Pour cette nouvelle édition, il sera question de comment faire de la place dans nos vies à des voix multiples et contradictoires, à un “Je” non unique, centre de gravité narratif, à des entités non-humaines et autres mondes invisibles, de comment en être remplis sans être assaillis. On se demandera ce que peut être une mystique contemporaine et dans quelle histoire hallucinée, illuminée, visionnaire nous souhaitons nous situer aujourd’hui. On cherchera les méthodes de désindividualisation afin de partager ces visions et de les rendre collectives et habitables.

Nous le ferons en explorant des textes d’hallucinés révoltés, en parcourant des œuvres révolutionnaires, anciennes et actuelles et en rencontrant des collectifs qui agissent aujourd’hui dans le domaine de la santé ou auprès de populations marginalisées, et qui chacun en fonction de leur territoire échafaudent des modes de soins syncrétiques. Cela supposera à la fois de penser de nouveaux ajustements pour une écologie des attentions et de proclamer notre confiance renouvelée dans l’art et la poésie, comme lieux ingouvernables, pleins d’une puissance de dérèglements, de désobéissance et d’imagination pour de nouvelles fictions politiques.

Les ateliers de lecture quinzomadaires qui, comme chaque année, accompagnent la préparation de cette édition du Printemps des Laboratoires débuteront le jeudi 6 octobre 2016.

Par ailleurs, la seconde saison du séminaire « Pratiques de soin et collectifs » construit et mené par Josep Rafanell i Orra commencera le jeudi 27 octobre 2016, il aura lieu chaque dernier jeudi du mois.




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Ce projet reçoit le soutien de l'Adagp et de Copie privée.

 

ESP (Extra Sensory Perception)

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Le Printemps des Laboratoires #5



Le Printemps des Laboratoires is a collaborative research project initiated by Dora García, Alexandra Baudelot and Mathilde Villeneuve, co-directors of Les Laboratoires d’Aubervillers. The programme unfolds all year long, through public workshops and events (film screenings, round-table discussions, performances, etc.) tied to particular problematic, relating to art yet exceeding it.

Over the course of the year, the project constructs a ‘concerned’ audience (everyone is invited to participate: local residents of Aubervilliers, students, amateurs, experts) in order to exchange and share perspectives and experiences. The project concludes during the spring with a public event with an international dimension,  offering a global presentation and analysis of the work carried out over the year.

The Printemps des Laboratoires is a collective work platform that privileges experiences of art and politics over their representations, and the circulation and confrontation of ideas over authoritative forms of transmission. It is a site for the transversal and critical development of various projects conducted by the artists working with Les Laboratoires d’Aubervillers. It offers, moreover, the possibility of observing and reflecting on current social and political issues from within an artistic context.

The first edition of the Printemps des Laboratoires (2013) titled “Commune, Commun, Communauté”, engaged with the question of the commons. The second edition (2014), “Ne travaillez jamais!”, explored the relationship between art and work, while the third edition (2015),“Performing Opposition” investigated how art relates to the ‘polis’, in opposition to instituted powers, paying particular attention to the notion of performing public space. For its fourth edition (2016), The Psychotropification of Society, we set out to explore the exponential rise in the use of medication in the treatment of mental health disorders, to reflect among other things on the effects of standardisation and control, and to explore more broadly society’s relationship to illness and madness.


The fourth edition opened up a far-reaching field of inquiry which we hope to continue to investigate during the upcoming season. In the fifth edition of Le Printemps des Laboratoires, titled ESP (Extra Sensory Perception), we will be pursuing our reflections via fortnightly reading workshops, the monthly ‘Care practices and collectives’ seminar, and other public events scheduled between October 2016 and June 2017.

This new edition will investigate how to accommodate multiple and contradictory voices in our lives, how to make a space for a non-singular “I”, the narrative centre of gravity, to non-human entities and other invisible worlds, and how to fill oneself with these voices without being assailed by them. We will be investigating what contemporary mysticism might look like and in what kind of hallucinated, illuminated, visionary history we wish to locate ourselves today. We will try to identify the methods of de-individualisation in order to share these visions and make them collective and inhabitable.

We will proceed by exploring texts crafted in revolt and hallucination, by engaging with older and current revolutionary works and by meeting with collectives who are active in the healthcare sector, and with marginalised populations who, in the sites where they are located, devise diverse modes of syncretic care. This programme presupposes that we reflect on new adjustments for an ecology of attentions and declare our renewed faith in art and poetry, as ungovernable sites, animated by a power for disorder, disobedience and for envisioning new political fictions.

The fortnightly reading workshops which, every year, are an integral part of the groundwork leading up to Le Printemps des Laboratories, will begin on Thursday 6 October 2016.

In addition to these reading workshops, the second season of the “Care practices and collectives” seminar organised and facilitated by Josep Rafanelll i Orra, will begin on Thursday 27 October 2016 and will take place every last Thursday of the month.




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This project is supported by Adagp and Copie privée.


Biographies

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DD Dorvillier is a dancer and choreographer born in Puerto Rico in 1967.
Rooted in questions about the relationships between abstraction, physicality, language, perception, meaning, Dorvillier's approach is both conceptual and physical. Her formal pursuits often lead to results charged with unexpected sensibilities, humor, and new questions. After her studies at Bennington College, she moved to New York City in 1989. For a dozen years she lived and worked at The Matzoh Factory in Brooklyn, a loft she transformed with fellow choreographer Jennifer Monson, where they developed their works, and supported the works of others, through cheap rehearsal space and public events. She's received many awards notably a Bessie for her work Dressed for Floating (2002), the Doris Duke Performing Artist Award (2013), The Guggenheim Fellowship (2011), and The Foundation for Contemporary Arts Award (2007).
In 2010 she moved to France. Her work has been shown at venues such as The Kitchen, Danspace Project, PS122, Impulstanz, STUK, Kaaitheater, DeSingel, Künstlerhaus Mousonturm, Hebbel Am Ufer, les Rencontres Chorégraphiques Internationales de Seine-Saint-Denis, L'Atelier de Paris/Carolyn Carlson, among many others. Her most recent work now on tour is Extra Shapes (2015), a collaboration with composer Sébastien Roux and lighting designer Thomas Dunn. It will be presented this february in Paris at the Centre Pompidou.

 

Alice Gautier graduated from the EESAB (DNSEP) Rennes in 2013, and has been pursuing her visual art practice through videographic and performative fictions. Since 2012 she has also worked in collaboration with other artists such as Alain Michard, Loïc Touzé and Daphné Achermann on scenic and cinematographic projects.
Her work experiments with different forms of narration, often located outside of language. Through the writing of movement, and working on a gestural vocabulary specific to each project, she stages characters that experience an interaction, either alone or in a group. Through gesture and everyday situations that she twists and shifts, she explores the body’s relationship to enunciation and transmission. By combining the tools of cinematographic language with those of choreography and video art — three arts of time and movement — she creates a hybrid space fuelled by the histories of these different mediums. Through a process of resistance or appropriation, she calls forth a filmic imaginary in her fictions, that does not appeal to our nostalgia but rather to a living, creative memory. She sometimes grounds her work in an existing film, in remake mode, and sometimes she interrogates our collective, surviving cinematographic memory by transposing film images into the field of performance.


Born in Israel, living in Europe. During the past years Adva Zakai has been exploring various performance formats where she has acted as a choreographer, a performer or a curator. Her choreographic works explore often how body and language are perceived through each other, and evoke an experience that can be grasped through multiple perspectives. During 2010, she obtained an artistic research grant, in the framework of the post master program a.pass in Antwerp, in which she researched the influence of a curatorial approach on the development of new performance formats. She pursued dance education in Israel followed by studies at the Mime School, Amsterdam (2000-2002). In recent years, she has been collaborating with other artists on developing participative events, conferences and festivals, as well as leading workshops in art and dance academies. She is currently artist in residence at les Laboratoires d’Aubervilliers (Aubervilliers, France)



Biographies

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Marcelline Delbecq, née en France en 1977, vit et travaille à Paris.
Après avoir étudié la photographie à Chicago puis à New York, Marcelline Delbecq obtient un DNESP aux Beaux-Arts de Caen en 2002 et un DESS Arts de l’exposition à l’Université Paris X-Nanterre en 2003. Elle conclu son parcours d'études par une résidence au Pavillon du Palais de Tokyo entre 2004 et 2005.
Son travail s’est peu à peu éloigné de la pratique de l’image pour se concentrer sur la potentialité cinématographique ou photographique de l’écriture. Son utilisation du récit, de la voix, a élaboré un univers narratif mis en mots et en sons pour convoquer un ensemble d’images mentales oscillant entre description et fiction, passé et présent. Dans ses installations sonores, publications et lectures en public, les mots mettent en jeux la question du regard en devenant à leur propre tour des images. Du 22 janvier au 7 mars 2015 a eu lieu l'exposition Silence trompeurà la Fondation Ricard à Paris, exposition qu'elle considère comme étant sa dernière. Elle se consacre désormais essentiellement à l'écriture et au spectacle vivant, ainsi qu'à l'enseignement à l'Ecole Nationale Supérieure du Paysage de Versailles et au Paris College of Art. Après avoir collaboré avec le chorégraphe Rémy Héritier sur le projet Here, Then, elle prépare actuellement un film d'images fixes (Bourse d'aide à la recherche, CNAP).  
Le travail de Marcelline Delbecq est souvent visible ou écoutable en France et à l'étranger dans les lieux dédiées à l'art contemporain.

DD Dorvillier est une danseuse et chorégraphe née à Puerto Rico en 1967. Fondée sur des questions concernant les relations complexes entre l'abstraction, la corporalité, le langage, la perception, le sens, la pratique de DD Dorvillier est à la fois conceptuelle et physique. Ces poursuites formelles génèrent souvent des propos chargés de sens, des sensations inattendues, de l'humour, de nouvelles questions. Après ces études à Bennington College aux Etats-Unis elle s'installe à New York en 1989. Elle vit et travail à la Matzoh Factory un studio reconnu de recherche et d’expérimentation à Brooklyn, crée avec la chorégraphe Jennifer Monson en 1991. À New York elle collabore avec de nombreux artistes comme Zeena Parkins, Jennifer Lacey, et Sarah Michelson. Elle est primée à plusieurs reprises et notamment pour Dressed for Floating (2002) pièce lauréate d'un Bessie Award, DD Dorvillier reçoit également le Foundation for Contemporary Arts Award (2007) le Guggenheim Award (2011), et le Doris Duke Performing Arts Award (2013).
Elle s’installe en France en 2010 où elle continue d’élaborer sa pratique artistique à l’international avec sa compagnie human future dance corps. Son travail est présenté dans des endroits tels que The Kitchen, Danspace Project, PS122, Impulstanz, STUK, Kaaitheater, DeSingel, Künstlerhaus Mousonturm, Hebbel Am Ufer, les Rencontres Chorégraphiques Internationales de Seine-Saint-Denis, L'Atelier de Paris/Carolyn Carlson, entre autres. Sa dernière pièce, actuellement en tournée, est Extra Shapes (2015). Il s'agit d'une collaboration avec le compositeur Sébastien Roux et le créateur lumière Thomas Dunn, elle sera presentée à Paris au Centre Georges Pompidou en février 2017.

Alice Gautier diplômée de l’EESAB (DNSEP) - Rennes en 2013, poursuit une recherche plastique au travers de fictions vidéographiques ou performatives. Depuis 2012, elle collabore également avec d’autres artistes comme Alain Michard, Loïc Touzé ou Daphné Achermann, sur des projets scéniques et cinématographiques.
Ses propositions artistiques expérimentent différentes formes de narration, se tenant souvent hors du langage. Par l’écriture du mouvement, la recherche d’un vocabulaire de gestes spécifiques à chaque projet, elle met en scène des personnages qui, seuls ou en groupe, font l’expérience d’une interaction. Elle explore par le geste et à partir de situations quotidiennes qu’elle tord, décale, les rapport du corps à l’énonciation, la transmission. En combinant les outils du langage cinématographique à ceux du champs chorégraphique ou encore de l’art vidéo, ces trois arts du temps et du mouvement, elle crée un espace hybride, nourri des histoires de ces différents médiums. Dans une démarche de résistance ou d’appropriation, elle convoque un imaginaire de cinéma dans ses fictions, sans faire appel à une nostalgie mais plutôt à une mémoire vivante, créatrice. Elle s’inspire parfois d’un film existant sur le mode du remake, d’autres fois questionne notre mémoire cinématographique commune, survivante, en transposant des images de films dans le champ de la performance.


Adva Zakai explore différents formats de performance, en tant que chorégraphe, performeuse, ou curatrice. Son travail chorégraphique s’attache à explorer la façon dont le corps et le langage sont perçus l’un à travers l’autre, et évoque une expérience qui peut être appréhendée à travers une pluralité de perspectives. En 2010, elle reçoit une bourse de recherche pour poursuivre, dans le cadre d’un programme de post-master à Anvers, une recherche sur les influences de l’approche curatoriale sur le développement de nouveaux formats de performance. Elle a suivi une formation de danse en Israël, poursuivi ses études à l’école de Mime d’Amsterdam (2000 - 2002). Ces dernières années, elle a participé à la programmation de festivals, d’évènements participatifs et de conférences, de workshops en écoles d’art et de danse.



Rencontre # 1 / Mathieu Bouvier, Marcelline Delbecq et Alain Michard

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14. Février 2017 - 20:00» 22:30
Mardi 14 février 2017, 20h

 

Rencontre # 1

Avec Mathieu Bouvier, Marcelline Delbecq et Alain Michard
assistés d’Alice Gautier

Quelques échanges sur nos pratiques de l'image et sur nos représentations du corps



Après une première rencontre inédite de deux chorégraphes, Adva Zakai et DD Dorvillier, Alain Michard, chorégraphe et cinéaste qui filme le mouvement des corps et des voitures, invite pour ce deuxième temps de rencontre du projet En Danseuse aux Laboratoires d'Aubervilliers Mathieu Bouvier et Marcelline Delbecq. Soit, un vidéaste-chercheur qui filme les corps (souvent de dos), et une artiste qui explore les relations du texte et de l'image (et chez qui la disparition des corps dessine le portrait en filigrane de leurs présences fantomatiques).

Tous les trois ont en commun de nourrir  un rapport au récit qui passe par l'image et de fréquenter, de près ou de loin, la danse dont ils ont fait une alliée. Si Alain Michard a rencontré ses invités par l'intermédiaire d'amis-artistes communs, Mathieu Bouvier et Marcelline Delbecq eux s'étaient rencontrés pour la première fois lors du projet La Montagne d'Aubervilliers, invités alors en 2012 par deux autres chorégraphes, Rémy Héritier et Laurent Pichaud.

Cette nouvelle rencontre sera l'occasion de croiser leur différentes manières de s'emparer de ce que le mouvement des corps figure ou des nouvelles images qu'il génère, de comment les inscrire au récit ou de les faire lever de lui.

Lors d'une soirée publique, ils présenteront la restitution de leurs échanges menés pendant plusieurs journées consécutives, s'invitant mutuellement à visiter leurs médiathèques respectives. Un échange qui viendra alimenter la recherche plus large que mène Alain Michard dans le cadre de sa résidence En Danseuse.

 

Entrée libre sur réservation
à reservation@leslaboratoires.org ou au 01 53 56 15 90



Portrait de Marcelline Delbecq par Rémy Héritier _ tous droits réservés

 

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